
Une enquête réalisée par l'organisation Parlons Climat dresse un portrait nuancé des climatosceptiques. Elle montre que les dénialistes représentent une minorité de ceux qui doutent.
Inondations à Valence, canicules en Inde et au Pakistan, mégafeux en Amérique du Nord… Cette année encore, des évènements météorologiques extrêmes ont illustré les conséquences dramatiques du dérèglement climatique. Les images s'affichent sur les réseaux sociaux, dans les médias, comme autant de preuves que la planète perd pied. Paradoxalement, la littérature scientifique laisse penser que le climatoscepticisme gagne du terrain dans la société française. Selon plusieurs sondages (Ademe, Ipsos/Steria), la part de climatosceptiques oscille entre 35 % et 43 % en 2023, contre 22% à 32% en 2021. Même constat dans le monde virtuel. Les travaux du mathématicien David Chavalarias indiquent que le discours climato-dénialiste se répand dans la twittosphère.
Que se passe-t-il dans la tête des climatosceptiques ?
Pour comprendre qui sont les climatosceptiques, Parlons Climat a réalisé une enquête « au plus près de ceux qui doutent ». L'organisation, qui s'est donné pour mission de « mobiliser de nouveaux publics en faveur de la transition écologique », a analysé les sondages et mené vingt-quatre longs entretiens avec des climatosceptiques. Elle dresse un portrait nuancé de ce groupe souvent réduit à des hommes d'extrême droite et complotistes. « Il y a un amalgame entre ceux qui nient l'existence du changement climatique et les personnes qui n'ont pas d'avis ou qui émettent des doutes sur l'origine anthropique », souligne Amélie Deloffre, cofondatrice de Parlons Climat.
Climatosceptiques : il faut distinguer les "durs" et puis les "mous"
L'enquête différencie les climatosceptiques "durs" des climatosceptiques "mous". Les premiers, dénialistes et complotistes, représentent 10 % de la population. Ce sont majoritairement des hommes d'extrême droite. L'opposition politique, la haine des écologistes et la défense de leur mode de vie sont les moteurs de leur scepticisme. « Ils sont dans la provocation, de mauvaise foi. Les freins ne sont pas rationnels : c'est le rejet de la lutte climatique qui nourrit le climatoscepticisme, et non l'inverse », commente Amélie Deloffre.
Même s'ils sont moins virulents, les climato-lésés expriment de la défiance envers les écologistes et ont peur de devoir changer leurs habitudes. Ce groupe, composé principalement de femmes actives et mères de famille, issues des classes moyenne et populaire, a l'impression que la transition écologique se fait à leurs dépens. Des solutions plus justes et moins coûteuses pourraient leur faire changer d'attitude.
Il existe de potentiels alliés
Pour Parlons Climat, ils représentent des "potentiels alliés", tout comme les climatosceptiques "mous". Eux émettent des doutes sur l'origine anthropique du dérèglement climatique, mais pensent qu'il faut changer nos modes de vie. « On peut être sceptique, mais soucieux de la pollution, vouloir réduire le nombre de voitures, développer le circuit court, etc. », pointe la cofondatrice de l'organisation.
La défiance envers les scientifiques et le manque d'information ne suffisent pas à expliquer la prégnance du climatoscepticisme dans la société française. « Beaucoup d'outils, d'efforts et d'argent ont été investis sur des stratégies d'information. On voit qu'on stagne, voire qu'on est en échec sur une partie de la population », souligne Amélie Deloffre. L'organisation préconise de montrer des solutions accessibles et de « faire émerger de nouveaux acteurs » afin de « dépolariser ce sujet » devenu une véritable source de tensions.
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