La Villa San Francisco, une nouvelle résidence d'artistes français au coeur de la Silicon Valley

La Villa San Francisco : la résidence d'artistes frenchy 2.0

© La Villa San Francisco

Inaugurée fin août, la Villa San Francisco exporte Outre-Atlantique la tradition des résidences d’artistes « à la française ». Une première placée sous le signe de la collaboration entre créateurs, communautés et entreprises de la Silicon Valley.

Depuis la création de l’Académie de France à Rome au 17ème siècle (Villa Médicis), le concept des « Villas », résidences d’artistes français dans le monde, a fait un bon bout de chemin. Après l’ouverture de la Casa Velázquez à Madrid et de la Villa Kujoyama à Kyoto, la tradition se déploie pour la première fois aux États-Unis avec la Villa San Francisco. La nouvelle institution culturelle, dont l’ambition est d’être « aussi agile qu’une start-up », a posé ses valises le 25 août dernier au cœur de la Silicon Valley.

« D’un côté, il y a cette tradition française des résidences d’artistes qui a débuté sous Louis XIV avec la Villa Médicis, de l’autre, le dynamisme de la baie de San Francisco et de la Silicon Valley », explique Juliette Donadieu, attachée culturelle à San Francisco. Pour celle qui dirige les services culturels de l’ambassade de France sur la côte Ouest américaine, c’est la rencontre de deux cultures que tout semble opposer. « Mais ce qui fait lien aujourd’hui, c’est la conviction qu’il faut réinviter les artistes à la table des débats et des grands enjeux de société. » Et quoi de mieux que de s’installer près des HQ de Facebook et Google pour développer des projets critiques autour de la tech et de l'innovation ?

Une résidence d’artistes « nouvelle génération »

La nouvelle Villa, qui cherche à créer des conversations entre créateurs, communautés et entreprises de la Silicon Valley, invite les artistes à s’interroger sur les challenges les plus pressants du moment – données personnelles, intelligence artificielle, mais aussi gentrification pour n’en citer que quelques-uns – en travaillant de façon interdisciplinaire. 

« On a imaginé la Villa comme une start-up culturelle, ajoute Mélanie Desliens, co-fondatrice de la Villa et vice-présidente de la French American Cultural Society (FACS). L’idée, c’est de mettre en lien artistes et entreprises et de créer des benchmarks, des productions que les acteurs sociaux et économiques pourront s’approprier de façon concrète. »

Au cours d’une résidence de 4 à 6 semaines, chaque artiste sera en mesure de découvrir un tissu culturel et entrepreneurial riche d’innovations technologiques et artistiques ainsi que des recherches universitaires. L’institution compte notamment l’Université de Berkeley parmi ses partenaires. Pour le meilleur comme pour le pire, « la Silicon Valley est au cœur des transformations sociétales, poursuit celle qui habite la baie depuis près de 20 ans. Malgré tous les défis qu’elle doit encore relever, elle est habitée par certains des plus grands cerveaux de notre époque. Il y avait urgence à créer une nouvelle plateforme transdisciplinaire, à réfléchir en dehors de nos murs. »

L’artiste n’utilisera pas le même langage que l’entrepreneur, le diplomate, le politique ou l’universitaire. Pour décrypter la boîte noire qu’est l’innovation, il faut la regarder par différents angles. 

Décrypter la boîte noire de l'innovation

Pensée par le studio de design Mortazavi, la Villa accueillera bientôt sa première promotion d’artistes. Le premier résident sera Alain Damasio, auteur culte de science-fiction, suivi de Chloé Jarry (productrice de nouveaux médias) & Aude-Emilie Judaïque (journaliste activiste), puis de l’artiste visuel Mohamed Bourouissa.

Photo, VR, spectacle vivant, littérature… « Chacun arrive avec ses valises et son univers », commente Juliette Donadieu. Mohamed Bourouissa souhaite par exemple appréhender l’intelligence artificielle à travers le prisme de la religion. Chloé et Aude-Emilie travaillent sur la question des frontières, en géopolitique et dans l’espace intime. Quant à Alain Damasio, il partira à la découverte du territoire, de ceux et celles qui le façonnent et de ses grands campus (Google, Facebook, Netflix, Apple, Airbnb…) pour nourrir son travail de romancier.

« Nous avons besoin des artistes pour découvrir de nouvelles perspectives, ouvrir de nouvelles fenêtres sur le monde », commente Juliette Donadieu. Face à un écosystème californien qui a toujours eu la conviction et la volonté de changer le monde, l’inauguration de la Villa s’apparente pour elle à une réaction "très française".  « L'artiste n’utilisera pas le même langage que l’entrepreneur, le diplomate, le politique ou l’universitaire. Pour décrypter cette boîte noire qu’est l’innovation, il faut la regarder par différents angles. Changer le monde, d’accord, mais alors avec des artistes ! »

Margaux Dussert

Diplômée en marketing et publicité à l’ISCOM après une Hypokhâgne, Margaux Dussert a rejoint L’ADN en 2017. Elle est en charge des sujets liés à la culture et la créativité.
commentaires

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  1. Avatar de Vaumas dit :

    Initiative formidable ! Félicitations et compliments pour cette très bonne redaction ! Merci !

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