film de guerre

Ce film de guerre qui a rendu le placement de produit obsolète et révolutionné le brand content

Long-métrage le plus cher de l’histoire du cinéma finlandais, « The Unknown Soldier » (2017) est devenu un cas d’école : à la place du traditionnel placement produit racoleur, les marques ont elles-mêmes participé au film en le marquetant de A à Z. Aux Cannes Lions 2018, les équipes du film expliquent pourquoi agences et annonceurs devraient s’en inspirer.

Sorti en octobre 2017, « The Unknown Soldier » (titre original : « Tuntematon Sotilas ») n’était pas prédisposé à résonner au-delà des frontières finlandaises. Long-métrage le plus emblématique de l’histoire du pays - le film raconte la lutte de soldats finlandais face à l’invasion de l’Union soviétique durant la Seconde Guerre mondiale – il est aussi celui qui a coûté le plus cher jusqu’ici. Coût total du tournage : 7 millions d’euros. Pour trouver les fonds nécessaires, son réalisateur, Aku Louhimies, et Eka Ruola, Directeur de création chez Hasan & Partners et producteur du film ont dû se creuser les méninges : derrière la caméra, c’est aussi l’histoire d’un échange de bons procédés entre marques et équipes de production, de techniques de financement inédites mais surtout d’un coup de com’ multicanal intelligent.
The Unknown Soldier – Official Trailer

Au lieu d’utiliser le film comme un moyen de mettre en scène les marques, nous leur avons demandé de faire la promotion du film pour se promouvoir elles-mêmes.

Avant, pendant et après le tournage, une quinzaine de marques finlandaises comme Valio (marque de produits laitiers) ou encore Jalostaja (produits de grande consommation) ont été invitées à participer à sa promotion, parfois même à son élaboration, via des contenus brandés aux couleurs du film, dénués de discours marketing traditionnels. « Nous avons inversé la logique du placement produit. », raconte Eka Ruola, en charge de coordonner la campagne du long-métrage et les actions de marques liées à son intrigue. « Au lieu d’utiliser le film comme un moyen de mettre en scène les marques, nous leur avons demandé de faire la promotion du film pour se promouvoir elles-mêmes ».

Tuntematon Sotilas | Veikkaus

Grâce à une stratégie marketing pensée sur-mesure, le tournage du film (lequel débute en juin 2016) évolue en symbiose avec les contenus de marques créés pour annoncer sa sortie. Le 6 décembre 2017, jour férié marquant la Déclaration d’indépendance finlandaise de la Russie, un dispositif global se met en place et vient faire vibrer la fibre patriote du pays. En guise de coup d’envoi, la chanteuse et actrice finlandaise Paula Vesala revisite l’hymne national finlandais et chante « Finlandia ».

film de guerre

Un mois plus tard, la société de loterie nationale Veikkhaus est l’une des premières marques à se prendre au jeu. En janvier 2017, elle lance une première campagne TV nous plongeant dans les coulisses du film et fait appel aux clients de sa base de données pour leur proposer de participer au tournage. L’engouement est tel que les 2 000 figurant requis pour le film se transforment en 14 000 volontaires. « Nous avons tout de suite décelé le potentiel du film ainsi que sa cohérence vis-à-vis des causes pour lesquelles nous luttons », souligne Olli Sarekoski, CEO de Veikkhaus. Depuis de nombreuses années, la société choisit en effet de s’engager en faveur des vétérans de guerre. Tout de suite, l’association fait sens. Sur ses briques de lait, la marque Valio propose des contenus du film en réalité augmentée tandis que le groupe presse Alma Media dévoile un numéro spécial dédié au long-métrage.

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« C’est un film qui fédère, qui attire des publics plus jeunes et crée des ponts entre les générations », explique le réalisateur Aku Louhimies, celui qui est allé jusqu’à y faire figurer ses propres enfants. « C’est le film que personne ne voulait faire et que tout le monde voulait faire à la fois, il fallait être audacieux pour tout miser sur cette journée particulière ».

Les marques, elles, ont eu carte blanche dans la mesure où elles acceptaient de se plier aux directives du scénario, aucun placement produit n’a été nécessaire. À la clé, une visibilité accrue et un engagement décuplé par l’engouement qu’a suscité l’imaginaire du film. Couplé à la campagne, le film aura généré 1 million d’entrées et engrangé 13,5 millions d’euros au box-office. Hélas, aucune retombée chiffrée n’a été dévoilée lors de la conférence du côté des marques mais on imagine aisément la fructuosité de ce type de collaboration.

Et s’il y a bien une leçon à retenir de toute cette histoire c’est bien celle d’Eka Ruola : « ne vous contentez pas de faire figurer la marque dans un projet artistique, impliquez-là ! »

Margaux Dussert

Diplômée en marketing et publicité à l’ISCOM après une Hypokhâgne, Margaux Dussert a rejoint L’ADN en 2017. Elle est en charge des sujets liés à la culture et la créativité.
commentaires

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  1. Avatar Daniel Lifeclass dit :

    C'est ce que nous pourrions nommer un bel "effet IKEA" publicitaire 🙂

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