Future of Storytelling

Storytelling : bienvenue en digiteracy

Future of StoryTelling, c'est une communauté et, tous les ans, un festival new-yorkais de deux jours. Objectif ? Réinventer l'art de narrer une histoire à l'ère du digital, nous explique son fondateur Charles Melcher. 

Quel est l’objectif de Future of StoryTelling (FoST) ?

CHARLES MELCHER : Je voulais réunir les personnes qui innovent dans la façon de raconter des histoires afin de pouvoir collaborer avec elles. Nous formons une communauté de passionnés du storytelling et de ses évolutions dans le monde digital. Les profils sont volontairement variés avec des personnes issues de media traditionnels (film, musique, télévision, print, journalisme…), du storytelling corporate (directions marketing, professionnels du branding ou de la publicité…), et de toute la communauté tech avec des géants comme Google et Microsoft, mais également une communauté de développeurs au sens large. Avec cette communauté, nous cherchons à cross-fertiliser les disciplines pour repenser la façon de raconter des histoires et briser les silos médias qui étaient jusqu’ici la norme. Les différentes disciplines ne se parlaient pas. Maintenant que nous sommes tous faits de 0 et de 1 pour raconter des histoires sur des plates-formes digitales, nous voyons ces silos disparaître petit à petit. 

Est-ce que cette destruction des silos est présente du côté des audiences ?

Je pense que les personnes ne font pas de différence entre un blockbuster hollywoodien et une vidéo YouTube quand elles regardent un contenu. Elles passent très vite de l’un à l’autre en y portant la même attention.

Vous utilisez souvent le terme de « digiteracy » dans vos interventions. Que signifie-t-il ?

C’est un terme pour expliquer comment nous racontons les histoires à notre époque. Nous sommes passés d’une culture orale à une culture alphabétisée (literacy en anglais). Aujourd’hui, nous sommes à la frontière de cette culture alphabétisée et de celle du digital que j’appelle la « digiteracy ». Nous sommes dans cette phase de transition.

Comment aborder cette transition ?

Avec FoST, nous voulons aider les gens à réfléchir pour qu’ils imaginent ce que peuvent débloquer ces nouveaux outils digitaux. Très souvent, lorsqu’une nouvelle technologie arrive sur le marché, nous avons tendance à l’utiliser comme nous utilisions l’ancienne. Quand la caméra a été inventée, on l’a posée sur un trépied et l’on a filmé en plan fixe comme nous filmions les pièces de théâtre. Il a fallu attendre entre vingt ou trente ans avant que se crée un langage propre au cinéma caractérisé par le montage, les coupures, les jeux de plans, etc. Aujourd’hui nous vivons la même chose avec les nouveaux outils que sont la réalité virtuelle, immersive, mixte, etc. Nous essayons de trouver le langage naturel, organique, de ces technologies que nous n’avons pas encore saisi. Je suis persuadé que nous allons trouver ce nouveau langage en cross-fertilisant les compétences et non pas dans une démarche d’auteur, seul, enfermé dans son garage. 

Il faut donc cesser de croire que « enfin, nous avons trouvé l’expérience du futur » dès qu’elle utilise de la réalité virtuelle ?

Il est indéniable que cette année est une grande année pour la réalité virtuelle avec la production d’un nombre incroyable de projets mais tous se cherchent encore. Depuis peu, on comprend que la VR ne sera pas le futur du cinéma. Beaucoup de réalisateurs qui constituaient la première vague de ceux qui ont fait de la VR venaient du cinéma ou de la vidéo. Ils ont appréhendé la VR de façon linéaire dans une histoire déjà tracée. Le seul « pouvoir » qui était donné aux personnes était celui de regarder autour de soi… Si vous allez dans un iMax voir un film, vous pouvez également regarder loin sur les côtés. Il est évident que la création de valeur de la VR n’est pas dans cette vision à 360°, même si elle peut, par exemple, augmenter la valeur d’un documentaire. 

D’où vient la valeur de la VR dans ce cas ?

De façon très simple et basique, les histoires qui utilisent la réalité virtuelle doivent proposer quelque chose que le cinéma ne peut pas offrir. À titre personnel, je pense que la VR et le futur du storytelling en général doivent permettre aux personnes d’avoir un rôle à jouer dans l’expérience. L’expérience Tilt Brush, par exemple, qui permet à l’utilisateur de dessiner dans un environnement à 360°, en est un parfait exemple. On peut également citer Birdly qui vous permet de voler comme un oiseau en adoptant sa position. Vous contrôlez où vous allez avec la possibilité de vous rendre dans presque n’importe quelle partie du monde, vous sentez le vent dans vos cheveux, quand vous baissez vos ailes vous plongez… Vous êtes dans un contrôle total de l’expérience.

Lors de la WSJ.D Live Conference, Satya Nadella, CEO de Microsoft, affirmait que le futur est dans la réalité « mixte » (mixed reality) qui mêle éléments du réel et éléments virtuels, et tout le monde attend avec impatience le lancement de Magic Leap dans ce domaine… Constatez-vous ce même engouement avec FoST ?

Magic Leap, HoloLense… beaucoup de projets sont en cours sur ces technologies mais très peu sont sortis. Pour ma part, je préfère parler de « living stories » (histoires vivantes). Des histoires où vous êtes engagés de façon multisensorielle, où vous êtes immergés, où vous pouvez participer, où l’expérience est personnelle, unique et personnalisée. Des entreprises comme The Void à Salt Lake City le font très bien. Elles ont par exemple créé une expérience dans laquelle vous devez vous déplacer physiquement. Pour vivre totalement l’expérience vous devez porter une veste qui réagira à vos interactions avec l’univers. Lorsque, par exemple, un mur s’effondre devant vous, vous ressentez les vibrations sur votre poitrine. Si vous sortez, vous ressentez la fraîcheur du vent. Quand vous cherchez à éclairer votre chemin avec une torche, vous devez tenir un véritable objet dans votre main. La porosité entre réel et virtuel est impressionnante.

Dans ce monde ultratechnologique, vous revisitez un objet surprenant : le livre ! Pourquoi cet objet ?

J’ai effectué une grande partie de ma carrière dans la publication de livres. C’est donc un objet que j’affectionne tout particulièrement. Nous repensons l’expérience du livre pour le rendre immersif avec des enquêtes, des jeux de piste, des énigmes, des interactions… Nous avons par exemple travaillé avec J.J. Abrams sur un livre qui s’appelait S, nous avons également réalisé un livre pour Mr. Robot, ou encore pour Ubisoft. 

A PROPOS DE CHARLES MELCHER

Charles Melcher est diplômé de Yale. Il est le fondateur et directeur de The Future Of StoryTelling (FoST) et fondateur de Melcher Media Inc. entreprise spécialisée dans l’édition de livres, d’applications, et de contenus pour les marques.

A PROPOS DE FOST

Future of StoryTelling (FoST) est une communauté de personnes issues des médias, de la technologie et de la communication qui explorent l’évolution du storytelling à l’ère du digital.

Au coeur de FoST: deux événements. Une conférence de 2 jours, uniquement sur invitation, qui réunit une sélection de penseurs et de makers pour partager leurs expériences autour du storytelling. Le FoST FEST, ouvert au public qui présente des expériences de réalité virtuelle, de réalité augmentée, des panels de conversations, des expériences en direct, des jeux interactifs et bien plus.

Le FoST produit également des contenus et des événements autour de ces activités.

https://futureofstorytelling.org/ 

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