En 21 ans, le mouvement 1% for the Planet a rassemblé plus de 450 millions de dollars auprès d’entreprises à destination d’associations environnementales. Rencontre avec Kate Williams, CEO du mouvement.
La transition écologique ne se fera pas sans le soutien massif des entreprises. Oui mais comment ? En France, le Grand Défi des entreprises pour la transition écologique a rassemblé plus de 100 entreprises françaises pour mettre au point 100 propositions concrètes sur les questions de climat et de biodiversité. De l’autre côté de l’Atlantique, en 2002, Yvon Chouinard, le célèbre fondateur de la marque Patagonia et Craig Mathews ont créé le mouvement 1% for the Planet.
L’objectif : développer un modèle de coopération en encourageant les entreprises à consacrer au moins 1 % de leur chiffre d’affaires à des associations œuvrant pour la préservation de l'environnement. Cette initiative novatrice a séduit des milliers d'entreprises à travers le monde qui mettent en œuvre une dynamique nouvelle de partenariat entre le secteur privé et les acteurs du changement écologique. Mais pour quel impact ?
Nous avons posé la question à Kate Williams, CEO de 1% for the Planet, lors de ChangeNOW, évènement de solutions pour la planète se tenant à Paris du 25 au 27 mai 2023.
L’ADN : Votre organisation a rassemblé plus de 450 millions de dollars à destination d’associations environnementales. Quelles sont les actions que vous avez soutenues qui ont eu le plus d’impact ?
Kate Williams : Je dirais que la chose la plus importante que nous avons accomplie est d'élargir la définition de l'environnement. Ce n'est pas une action spécifique, mais ce que nous avons fait ces dernières années a créé quatre domaines d'impact vers lesquels tous nos dons sont orientés. Il s'agit des économies durables, des communautés résilientes, de la restauration et de la conservation, ainsi que des droits de la nature. Nous mobilisons ainsi les Objectifs de Développement Durable des Nations Unies.
Grâce à notre modèle qui consiste à faire des dons aux organisations environnementales à but non lucratif, nous avons pu distribuer ces dons sur un éventail plus large d'organismes de ce type, allant au-delà de ce que les gens considèrent comme des organisations environnementales traditionnelles. Mais nous pensons que c'est vraiment important, car nous abordons aussi les questions de justice et les problématiques intersectionnelles.
De plus en plus d’entreprises souhaitent participer à leur manière à la transition écologique et à la protection de la planète. Est-ce plus facile d’être philanthrope en 2023 ?
K. W : Au début des années 2000, il n'y avait pas autant de pression sur les entreprises ni d'attentes des consommateurs quant au fait que les entreprises doivent intégrer une dimension sociale ou environnementale à leur ethos. Le concept d'entreprise à mission n'était pas aussi répandu à l'époque. Ce mouvement s’est accéléré ces trois à cinq dernières années car les consommateurs s'attendent à pouvoir voter avec leur carte bancaire pour soutenir les marques qui proposent des solutions. Et la plupart des gens ne sont pas des philanthropes. Ils achètent des produits alimentaires, paient leur loyer, se concentrent sur l’essentiel. Avoir la possibilité de contribuer à des solutions en faisant ses courses au supermarché est quelque chose de très puissant. Les entreprises en sont parfaitement conscientes et le perçoivent comme une opportunité. L'intérêt de participer à une structure comme 1% for the Planet s'est renforcé.
Toutes les entreprises sont-elles les bienvenues ? Comment prévenez-vous le greenwashing ?
K. W : 1% for the Planet est à l'opposé du greenwashing car chaque entreprise, qu'elle soit grande ou petite, quel que soit son secteur d'activité, fait un don de 1 % chaque année. Si elles ne sont pas certifiées, elles ne peuvent pas rester être membres. Nous sommes perçus comme une institution crédible. Il est important que les gens soient sceptiques et soient vigilants vis-à -vis du greenwashing. Mais nous devons nous rappeler que personne n'est parfait. Permettre aux entreprises de progresser est capital. Certaines craignent d'agir par peur d'être critiquées, j'aimerais que cela change car nous avons constaté que ces entreprises trouvent l’énergie pour accomplir tout un tas de choses une fois qu’elles se sont engagées auprès de 1% for the Planet.
J'ai un excellent exemple d'une entreprise qui a rejoint le réseau en se contentant de donner leur 1 %, sans rien faire d'autre. Ils adoraient Yvon Chouinard et voulaient lui ressembler. Quelques années après, ils ont discuté avec l'organisme à but non lucratif auquel ils faisaient don de leur 1 %. Et cet organisme leur a dit : « Merci beaucoup pour l’argent que vous nous avez donné mais vos produits contiennent beaucoup de plastique. Peut-être, pourriez-vous faire quelque chose à ce sujet ? ». Ils en ont pris bonne note et ont eu une conversation similaire avec Yvon Chouinard qui leur a dit la même chose. Dix ans après leur adhésion, ils ont éliminé tout le plastique de leurs produits au profit d’un nouveau processus de fabrication de lunettes de soleil afin de fabriquer des montures entièrement recyclées. Tout cela s'est fait étape par étape, sous la pression positive de leurs pairs.
Quels sont les grands projets à venir ?
K. W : Cette année, nous sommes en bonne voie pour dépasser les 500 millions de dollars. Cela nous place sur la trajectoire d'atteindre le milliard de dons cumulés d'ici trois à cinq ans, si nous continuons de progresser au même rythme. Notre objectif principal est de générer davantage d'impact grâce à nos dons. Dans cette optique, nous avons également lancé le Planet Impact Fund l'année dernière. Il s'agit d'une opportunité pour les philanthropes de toutes tailles de participer à hauteur de 20 ou 20 millions de dollars sans nécessairement être membres. Nous avons créé ce mécanisme supplémentaire afin d'augmenter notre influence et provoquer un changement d’échelle bien plus important.
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