Campagne Greenpeace avec des blocs de glaces BlaBla qui fondent

Crise climatique : quelles solutions pour sortir de l'apathie ?

© Greenpeace / Strike

Entre collaborateurs qui se verraient bien en sabbatique et managers au bout du rouleau... il y a de la démobilisation dans l'air. C'est dommage. Parce que nous n'avons jamais eu autant besoin de se remonter les manches, ensemble.

D’un côté, beaucoup de stress et de dépression et le souffle d'une démobilisation collective. De l’autre, un contexte d’instabilité et de permacrises qui nous demande d'inventer de nouveaux modèles. Drôle de contexte. Éric Duverger n’est pas optimiste de nature. Il a quitté ses fonctions de directeur de la RSE dans un grand groupe pour créer la CEC, la Convention des entreprises pour le climat. Le projet : faire bosser 150 patrons d’entreprises de tailles moyennes lors de 12 sessions de travail en commun pour qu’ils fassent basculer leurs entreprises en mode green. Il a conscience de « l’ampleur des chantiers qui sont devant nous », « plus exigeants encore que ceux de la révolution numérique » . Mais il a des convictions. « Les changements sont tellement radicaux que la mobilisation pour y parvenir doit être maximum. Et pour cela, il y a trois conditions à réunir : que tout le monde comprenne l’urgence de la situation, qu’on se mobilise sur une feuille de route claire, et qu’on soit tournés vers l’action. »  

Acculturation partagée

La révolution écologique..., c’est (tellement) compliqué ! D’abord parce que cela concerne tous les pans des organisations : comment on produit, comment on achète, comment on vend... Mais aussi parce que cela oblige les entreprises à se demander pourquoi elles font ce qu’elles font et quelle est l’utilité de leurs activités : mon produit – ou mon service – est-il assez indispensable pour justifier de son existence et de tous les effets de bord qu’il entraîne ?

Face au nombre des chantiers, des questions à résoudre, des solutions à inventer, la première chose que les participants de la CEC ont comprise, c’est qu’ils ne pourront jamais y arriver seuls, qu’ils ont besoin d’entraîner leurs équipes, et même, au-delà, leurs partenaires, leurs clients, leurs concurrents... Ils ont immédiatement réclamé des outils pour (in)former leurs collaborateurs – et leurs écosystèmes – sur les enjeux climatiques. Eux-mêmes ont été bouleversés en comprenant l’urgence et l’étendue des questions soulevées, mais tout de suite persuadés que tous leurs interlocuteurs devaient partager le même niveau de compétences pour pouvoir se mobiliser. 

La feuille de route

L'acculturation, c’est bien. Mais quand cela concerne la révolution écologique, cela peut soulever une grande vague d'écoanxiété. Il faut donc que l’acculturation s’accompagne d’un projet mobilisateur. Comme les solutions clé en main n’existent pas, il s’agit avant tout de nommer les chantiers sur lesquels on va agir, à quel horizon et avec quels moyens. Bref, faute de manuel, établir une feuille de route. Là encore, ce sont les dirigeants réunis à la CEC qui ont déterminé qu’ils devaient avoir travaillé cette feuille de route avant de sensibiliser leurs équipes, afin de pouvoir la leur livrer dans la foulée, pour que chacun puisse se tourner vers l’action collective plutôt que vers la déprime individuelle.

Une nouvelle culture

Faire passer les entreprises d’une culture extractive – tournée vers la croissance infinie et le toujours plus, toujours plus vite – à une culture régénérative – qui restaure le capital naturel utilisé –, ce n’est pas simple. Surtout quand il n’existe pas encore de corpus pour expliquer comment faire et par où commencer. Mais les concepts sont posés, des expérimentations sont en cours, et les recherches pour évaluer les résultats commencent à être publiées. Pour partager ces savoirs, là encore, le collectif devient indispensable. Éric Duverger parle d’une bascule culturelle : « La révolution climatique va transformer nos modèles d’organisation et de leadership bien davantage que la révolution numérique ne l’a fait. Pour trouver des solutions, il va falloir avant tout savoir collaborer, faire travailler ses équipes ensemble, mélanger les compétences, les points de vue, partager des chantiers avec ses concurrents, dialoguer avec ses clients... Autant de qualités qui demandent de quitter les modèles autocratiques, en silos, compétitifs, fermés, pour favoriser des structures qui fonctionnent sur des modalités presque inverses. »

À CONSULTER

Le site de la CEC, et notamment le rapport final de la première Convention des entreprises pour le climat : « Une grande bascule vers l’entreprise régénérative », octobre 2022.

Cet article est paru dans le numéro 35 de la revue de L'ADN, Où sont les travailleurs, Ils ne veulent plus travailler comme avant. À commander chez votre libraire ou sur notre site.

Béatrice Sutter

J'ai une passion - prendre le pouls de l'époque - et deux amours - le numérique et la transition écologique. Je dirige la rédaction de L'ADN depuis sa création : une course de fond, un sprint - un job palpitant.

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commentaires

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  1. Avatar Anonyme dit :

    Pour réussir, il va surtout falloir accepter les conséquences des modes de vie alternatifs ! Les solutions, nous en avons beaucoup, certaines non-viables (comme la voiture électrique, les stations d'absorption du carbone, etc.), d'autres utopistes et enfin des approches très pragmatiques. Mais ce que nos sociétés, majoritairement ancrées dans un capitalisme extractiviste et productiviste, ne peuvent accepter, c'est la remise en cause de ce modèle de société ! Pourtant, là aussi, tout a été écrit et analysé, depuis l'accaparement des richesses par un tout petit nombre jusqu'à l'incroyable manque de sens du travail et de la possession matérielle. Mais cet autre monde impose un changement tellement profond que c'est tout bonnement inenvisageable, en particulier par les puissants.

  2. Avatar Anonyme dit :

    En grande partie d'accord avec le commentaire ci-dessus.
    Concernant l'"acceptation du changement par les puissants" (que j'associe aux actionnaires de ces entreprises), il est clairement expliqué et accepté (dans la soutenabilité forte) que la sphère économique n'est prospère que si la sphère humaine/sociale est en bon état, elle même étant en bon état que si la sphère planète/nature l'est. En gros, sans planète saine, pas de client capable de consommer, donc pas de business. Ces "puissants" ont donc aussi tout intérêt à faire évoluer le système pour pérenniser leur puissance qui est vouée à disparaitre dans le système actuel... En théorie du moins.

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