
De Londres à Dubaï, les établissements de luxe rivalisent d'innovations pour séduire une clientèle fortunée obsédée par l'optimisation de sa santé. Mais l'argent suffira-t-il à s'acheter du temps de vie ?
Lire la première partie : Tourisme de luxe : jusqu’où aller pour vivre plus longtemps ?
L’hospitalité de luxe surfe sur la vague longévité, en transformant ses palaces en nouveaux laboratoires du bien-être. Il s’agit en effet de répondre à la demande concrète d’une clientèle prête à débourser des sommes considérables pour des protocoles de pointe – aux bénéfices encore débattus.
Mais face aux moyens et à l’expertise de cette clientèle, les établissements revendiquent une approche qui se veut ultra-scientifique, entre équipements dernier cri et personnalisation toujours plus poussée. Dans cette catégorie, plusieurs propositions de valeur émergent. D'abord, le biohacking et les protocoles de récupération optimisés, avec des resorts équipés de chambres de cryothérapie, d'oxygénothérapie hyperbare, de thérapie par lumière rouge etc. Objectif ? Améliorer la santé cellulaire, la fonction cognitive, la récupération…
Ensuite, les programmes personnalisés de santé et de longévité, grâce à l'analyse des biomarqueurs sanguins, au séquençage ADN etc. L'idée est de prendre en main le client dès le check-in pour un diagnostic, afin d’élaborer ensuite des programmes sur mesure (nutrition, exercices, gestion du stress, sommeil…). Par ailleurs, les soins wellness deviennent ultra-avancés, pour ne pas dire médicalisés : IV drips (injections de vitamines), thérapie par cellules souches, optimisation hormonale, etc. Enfin, les espaces de remise en forme et de régénération (merci de ne pas confondre avec une simple salle de sport), grâce à leurs bassins de flottaison, bains de glace, thérapie de compression, etc.
« Peu de preuves robustes »
SHA Wellness Clinic, avec ses implantations en Espagne et au Mexique, propose ainsi des « thérapies de régénération cellulaire avancées », avance le média spécialisé Roadbook. L'hôtel Corinthia à Londres a conclu un partenariat avec le London Regenerative Institute, proposant une gamme complète de services, des tests épigénétiques visant à déterminer la vitesse de vieillissement (chère à Bryan) à l'oxygénothérapie hyperbare. Le Mandarin Oriental Genève propose un séjour exclusivement consacré au sommeil, avec trois nuitées et un test polysomnographique, en partenariat avec la clinique Cenas. Au Plaza Athénée à Paris, le Dior Spa propose une « Light Suite » , cabine au « plafond reproduisant la lumière du soleil, offrant une régénération du corps par la lumière (…) – idéale pour récupérer d'un jetlag ou lutter contre le stress quotidien. »
Et les prix suivent : Surrenne, le club privé londonien attenant à l'hôtel The Emory, facture 12 000 dollars son adhésion annuelle. Pour cette somme, vous pourrez accéder aux installations du club où les équipements (studio de yoga avec écran immersif du sol au plafond, piscine de 22 mètres avec puits de lumière…) côtoient les œuvres de Damien Hirst, avec un éclairage adapté aux cycles circadiens. Surenne vous propose aussi une batterie de tests (cardiovasculaire, musculaire, métabolique, hormonal) pour accéder à des programmes hyperpersonnalisés, en partenariat avec des pointures comme le généticien spécialiste de la sénescence David Sinclair ou la coach Tracy Anderson, qui compte dans son track record Madonna ou Gwyneth Paltrow. Surenne est attendu à Paris, dans le quartier de Saint-Germain-des-Prés, en 2027.
Les capitaux affluent
Toutefois, cette course à la longévité soulève des questions légitimes que l'industrie préfère souvent éluder. La réalité scientifique serait-elle moins flatteuse qu’elle n’y paraît à la lumière des LED ? Interrogé par Roadbook, le Dr Gindo Tampubolon, de l'université de Manchester, tempère : « Il existe peu de preuves robustes que ces traitements ajoutent scientifiquement des années à la vie. » Les fondements mêmes de certaines théories à la mode sont parfois disputés. Les « Zones Bleues » font l'objet de critiques croissantes de la communauté scientifique. Certains chercheurs remettent en question la validité des données collectées, soupçonnant des biais de sélection et même des fraudes aux pensions de retraite – même si les habitudes promues restent scientifiquement prouvées dans la prévention des maladies.
Alors le tourisme de longévité peut-il vraiment ralentir le vieillissement des fortunés en mesure de le pratiquer ? Par structure, seul le temps pourra répondre à cette question, comme le concède Tom Wingert, directeur commercial du Continuum Club new-yorkais (10 000 dollars par mois, dépistage biométrique compris), à CNN : « On ne peut pas parler de longévité de façon probante sans faire une analyse longitudinale et voir ce que nous accomplissons dans 30 ou 40 ans. »
Vivre en mode longévité toute l’année
Cette ambiguïté n'empêche pas les capitaux d'affluer dans ce que certains appellent « Health and Longevity Integrated Resorts » (HLIRs). Les investisseurs se tournent ainsi vers ce nouveau segment porteur, où le mariage entre wellness et technologie médicale crée des expériences exclusives à forte valeur ajoutée et des actifs immobiliers.
Pour Luxxie Lime, société de conseil spécialisée dans l'hospitalité et le lifestyle, ces investissements se déclinent en plusieurs tendances hôtelières : la verticalisation des partenariats entre groupes hôteliers et acteurs biotech ou cliniques spécialisées en médecine fonctionnelle, garantissant des soins exclusifs et des traitements anti-âge brevetés, facteur clé de différenciation ; l'émergence de retraites haut de gamme, esprit « boutique » dédiées à la bio-optimisation qui, par leur taille réduite et leur spécialisation pointue, génèrent des marges très élevées par client ; un flux de capital-risque dans des startups de technologies d'hospitalité santé, du diagnostic avancé à la récupération personnalisée, destinées à s'intégrer dans ces environnements luxueux ; et même le développement de résidences de bien-être intégrées aux resorts, où les clients peuvent littéralement vivre en « mode longévité » toute l'année, avec des prix pouvant dépasser de 30 % ceux des propriétés de luxe classique.
La révolution pourrait donc être copernicienne pour le tourisme de luxe, une révolution où la valeur ne se mesure plus en carats ou en mètres carrés, mais en années de vie gagnées sur son âge biologique… En 2021 déjà, 58 % des consommateurs aisés de la région Asie Pacifique considèrent le temps comme un luxe supérieur à l'argent, selon l'étude New codes of luxury de Vice Media Group… De quoi éclairer l'obsession croissante pour la longévité – comme une façon de s'acheter du temps qui devient littéralement possible, du moins en théorie.
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Merci pour cet article qui démontre plus la cupidité et l'imbécilité des thérapies face à une vie saine. Pour avoir été formateur en dopage et en stupéfiants quand je lis l'article je suis ... consterné. Caisson hyperbare pour augmenter l'oxygénation du corps : fausse bonne idée, en effet l'oxygène est le moteur des muscles mais aussi un oxydant. il suffit de regarder deux visages. Le premier champion ou championne du 100 mètres. Un visage jeune, presque sans défaut. Le deuxième un coureur du marathon. le visage est vieilli et ne correspond pas à l'âge du participant. pour cause le corps suroxygéné libère des radicaux libres qui abîment la peau. Si l'on souhaite une suroxygénation il suffit d'aller à plus de 2000 mètres d'altitude pour avoir sa dose. Un trop long séjour en altitude peut aussi provoquer ce qu'on appelle l'ivresse de l'altitude. Pour la gestion du stress, il est vrai que celui-ci est toxique pour le corps et l'esprit. Cette gestion est assuré pour les sportifs, dans certains hôpitaux et tout à chacun avec un sophrologue sans qu'il vous coute un "bras". La cryothérapie est bénéfique sans aucun doute comme une luminothérapie pour des résoudre quelques problèmes spécifiques. Mais une nourriture et une vie équilibrée (marche ou autre activité physique, respiration, famille) permettent de vivre longtemps et bien. Encore faut-il se tenir éloigné des produits stupéfiants, des compléments alimentaires qui peuvent altérer les organes si ceux-ci ne sont pas utiles (donc priorisé une analyse de sang pour en déterminer les besoins) d'une vie dissolue, d'obsession de soi, de paraître et autres. Prendre soin de soi, c'est avant tout une pensée profonde qui veille à un épanouissement en accord avec soi et son environnement bref les fondamentaux : "Mens sana in corpore sano". "Un esprit sain dans un corps sain" (expression attribuée au poète Juvénal 90 et 127 après Jésus-Christ). La santé est à la portée de tous. Ce n'est pas un luxe. C'est une question de bon sens. Le mieux est l'ennemi du bien.