
Le «shared» est devenu l'obsession des producteurs de contenus. Dans cette guerre du partage, de nouveaux usages apparaissent qui pourraient donner une meilleure place à la qualité. Par Marie Dollé de Kantar Media Intelligence.
Une industrie du « shared » et du viral
Certains créateurs de contenus placent même le potentiel de partage d’une publication au-dessus de toute considération. Peu importe la qualité de celle-ci, de ce qu’elle traite ou du nombre de fois où elle a été vue du moment qu’elle est tweetée ou partagée sur les différents réseaux sociaux. Un quête de « viralité à tout prix » que David Spark dénonce : « La raison pour laquelle tout le monde veut du viral c’est la large portée que celui-ci offre sans avoir à payer. Qui ne le voudrait pas ? Mais vouloir un contenu viral à tout prix vous conduit parfois à tenter de « déjouer le système » en produisant des contenus qui ne sont pas forcément adaptés à votre cible et à votre entreprise. »*
Quel Twittos n’a pas déjà été confronté au DM ou à la notification sur sa timeline : « STP retweet mon dernier contenu » ? Et que dire de ces applications tierces qui s’immiscent de manière insidieuse dans vos comptes sociaux et publient à tout va ! Aujourd’hui, ces pratiques agacent…
Un travers de plus en plus répandu est le fait d’inviter le lecteur à partager un contenu avant même qu’il ait eu le temps de le voir ! Le portail masculin Gentside agrémente ses accroches de posts par un proéminent bloc « Avez-vous partagé cet article ? » pendant que d’autres en font même leur fonds de commerce.
En effet, le site Pay with a tweet donne la possibilité aux personnes d’accéder à un contenu moyennant le « paiement d’un tweet ». Et cela semble fonctionner pour certains types de contenus comme la musique, les jeux, et les ebooks… Car c’est exactement le type de « cadeau » qu’un producteur est prêt à faire en échange d’une promotion gratuite.
Mais le problème avec ce genre de méthodes est qu’elles ne différencient pas les bons contenus, ceux à forte valeur ajoutée, des contenus médiocres. Elles demandent aux consommateurs de payer à l’avance pour un contenu dont ils ignorent la qualité, simplement en le partageant. Ainsi, plus de six millions de personnes ont déjà « payé d’un tweet » quelque chose, alors que cela n’est absolument pas un gage de qualité ou d’intérêt. C’est à l’évidence un fort levier quantitatif dans une stratégie Earned Media, mais avec quel impact qualitatif pour la marque ? Au contraire, nous pourrions comparer cette pratique et les contenus associés à une forme de spam.
Best practices : la techno autour du « shared »
De son côté, Mashable a adopté une démarche plus avisée. Le géant des nouvelles technologies va au-delà du simple partage intégral et donne la possibilité de partager les temps forts d’un article (qu’il s’agisse d’une citation en relief ou d’un contenu multimédia) via Facebook, Twitter, Google + ou Pinterest. Bien sûr, cela peut conduire à une vague de tweets similaires mais au moins, on sait que l’utilisateur a lu l’article ou les éléments en relief avant de le(s) partager. Une démarche que l’on retrouve également sur le site d’information Slate.com qui étend cette fonctionnalité de partage a l’ensemble du texte.
Capture d’écran du site Mashable
Capture d’écran du site Slate.com
Medium, un nouveau site qui permet de partager des histoires de plus de 140 caractères a pris le parti d’une démarche plus audacieuse encore. Les lecteurs peuvent choisir un extrait de ces textes et les tweeter en les recommandant grâce à des annotations qui s’insèrent sur une colonne à droite. Avec cette possibilité, Medium se concentre sur l’utilisation première du partage : stimuler et engager le débat.
Capture d’écran du site Medium
Course à la viralité ou course à la qualité ?
Quelles sont les leçons que les communicants devraient retenir de ces exemples ? Tout d’abord, il s’agit de se concentrer sur le contenu. Nous ne le répèterons jamais assez, il est primordial de produire un contenu de qualité sans perdre de vue sa cible. Car le véritable potentiel de la viralité réside dans cette qualité, au-delà de l’expérience que les marques offrent à leurs publics.
Le temps est venu de repenser la notion de contenu « viral ». Plutôt que de considérer la viralité comme un but, qui apporte des effets sur le court terme, nous devrions chercher à obtenir des évolutions sur le long terme. Produire du contenu qui a un impact positif pour l’entreprise, qui s’inscrit dans la durée et surtout qui va au plus près des publics pour créer du lien. Ce que David Kearns, ancien député américain et ex-CEO de Xerox, résume fort bien par la phrase suivante : « Dans la course à la qualité, il n'y a pas de ligne d'arrivée. »
Marie Dollé
https://twitter.com/MarieDOLLE
Responsable des contenus
Kantar Media News Intelligence
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