
Les énergies renouvelables et les biocarburants gagnent du terrain en France et partout dans le monde pour faire baisser les émissions de gaz à effet de serre, mais très en deçà des nécessités imposées par le réchauffement climatique.
Le 8 octobre 2018, le rapport du GIEC avait jeté un grand froid chez les climatosceptiques. Le Groupe intergouvernemental sur l’évolution du climat confirmait le réchauffement de la température mondiale de 1°C en moyenne depuis le début de l’ère industrielle, et que c’est bien là le résultat de l’activité humaine. Par ailleurs, il annonçait que si nous ne changions pas nos pratiques, les températures pourraient encore augmenter de 1,5°C dans les dix prochaines années et de 3°C d’ici 2100. Depuis, les prévisions ne cessent d’empirer.
Sur le banc des accusés, on retrouve toujours les mêmes. Au premier rang, à l’origine de tout, le secteur de l’énergie.
Percée des énergies renouvelables... ou pas
Face à la nécessité et à l’urgence de changer de modèle, les initiatives vertes portées par les pouvoirs publics, les entreprises et les industriels se sont multipliées depuis le début des années 2000. Mais ce twist énergétique à grande échelle est-il possible ? Il reste plus facile à dire qu’à faire.
La politique gouvernementale se dit, en la matière, volontariste. La PPE (Programmation pluriannuelle de l’énergie) fixe la feuille de route en matière de transition énergétique. Pour 2023, elle vise une baisse de 20 % de la consommation des énergies fossiles au profit des énergies renouvelables. La loi de transition énergétique pour la croissance verte prévoit quant à elle de « porter la part des énergies renouvelables à 23 % de la consommation finale brute d’énergie en 2020 et à 32 % de la consommation finale brute d’énergie en 2030 ».
Tout cela semble aller dans le bon sens. On pourrait croire que le soleil brille haut dans le ciel et que les lendemains vont chanter. Mais le bilan des énergies renouvelables reste pour l’instant mitigé. Leur percée est bien réelle, mais elles ne représentent actuellement que 16 % de l’énergie consommée en France et se positionnent à la 4e place derrière le nucléaire, le pétrole et le gaz.
Du côté du solaire, on pourrait prétendre à un progrès considérable. Fin 2018, la puissance raccordée au réseau EDF du parc solaire français enregistrait une progression de 45 % par rapport à l’année précédente, d’après le SDES (Service de la donnée et des études statistiques) du ministère de la Transition écologique et solidaire. Mais ne nous leurrons pas : l’ensemble représente à peine 2 % de la production nationale d’électricité. Sur l’éolien, même constat. Ça progresse gentiment... mais ça ne pèse toujours pas lourd. Avec ses turbines comme seul moyen de production, la France ne pourrait couvrir que 10 % de ses besoins en électricité. L’exploitation de la biomasse – c’est-à-dire la production d’énergie à partir des végétaux, des bactéries, des champignons et des animaux qui est transformée par combustion dans des centrales – reste anecdotique en France. L’AIE indique même en 2017 que l’utilisation de la biomasse pour produire de l’énergie renouvelable au niveau mondial a baissé de 1,5 % par rapport aux années précédentes.
Bref, les énergies renouvelables progressent à un rythme lent, et comme la consommation globale d’énergie est en forte augmentation, la part des énergies fossiles reste la plus importante... de loin.
Le coût encore trop élevé et la grande variabilité des volumes de production des énergies renouvelables expliquent leur faible pénétration sur le marché français. Pour un particulier, la difficulté de raccordement d’une installation photovoltaïque au réseau représente une contrainte très forte.
Résultat, nos besoins énergétiques sont toujours massivement couverts par les hydrocarbures. C’est particulièrement vrai dans le secteur des transports. Les véhicules thermiques restent très largement majoritaires dans le parc automobile français et mondial.
Changer de modèle, un vrai défi
Le recours à des ressources renouvelables pour produire de l’énergie marque une rupture avec les processus industriels à l’œuvre depuis la seconde moitié du XIXe siècle. Le charbon et le pétrole ont modelé les technologies et les pratiques tout autant que l’économie.
En France, notre dépendance au nucléaire, première source de production d’électricité, est très importante. À l’heure actuelle, il est impossible de s’en passer. Le nucléaire reste une source d'énergie faiblement émettrice en CO2, qui permet de couvrir à grande échelle les besoins des populations.
La transition énergétique demande donc une véritable révolution des modes de production et de consommation. Il faudra trouver des solutions simples et rentables d’approvisionnement, de stockage et d’usage.
Un new deal énergétique grâce au numérique ?
Le numérique pourrait modifier le rapport de force entre le consommateur et le fournisseur, en permettant l’apparition de plateformes d’échange « peer to peer » qui mettent en relation producteurs et clients, à l’écart des circuits institutionnels et des grandes entreprises. Ces plateformes utilisent la blockchain pour garantir la traçabilité de l’énergie échangée et pour régler les transactions. Des startups comme Enyway ou LO3 proposent déjà ce service.
Un modèle décentralisé et coopératif d’échange d’énergie est en train de voir le jour. Cela veut dire que les particuliers produisant de l’électricité solaire pourront partager, et même vendre, leur surplus. En cela, le numérique favorise la progression des énergies renouvelables « autoconsommatrices », c’est-à-dire produites et consommées sur un site privé. L’apparition des smart grids – des réseaux de stockage et de distribution d’électricité pilotés par le numérique – va encore accentuer ce phénomène en simplifiant les échanges d’énergie entre les particuliers.
Cette migration vers une offre énergétique très flexible, dont le centre de gravité est positionné sur le renouvelable, est aujourd’hui fortement perceptible. Depuis quelques années, les principaux fournisseurs d’énergie – EDF, Engie et Total – de même que de nombreuses startups, proposent à leurs clients des contrats d’approvisionnement en électricité solaire, directement livrée chez eux, sans aménagement spécifique. Cette électricité, généralement achetée à l’étranger, permet une livraison sans contraintes de raccordement au réseau EDF.
Évolution notable, le choix du solaire dépend également aujourd’hui de plus en plus d’un réflexe collectif. Ainsi, le hameau de Luc-sur-Aude, situé en Occitanie, a été en 2018 le premier village de France à se doter d’un parc solaire. En mutualisant les moyens financiers, Luc-sur-Aude arrive à couvrir l’ensemble de ses besoins en électricité grâce à une production annuelle de 320 000 KWh.
Réinventer l’énergie
Les biotechnologies ouvrent des perspectives enthousiasmantes pour l’avenir. Les travaux menés par les startups et les laboratoires sur la bioluminescence permettent aujourd’hui de produire de la lumière en exploitant les ressources du vivant. Et sans électricité. Ainsi, la startup Glowee a mis sur le marché une technologie d’éclairage biologique qui utilise la lumière produite par les organismes marins. Entièrement renouvelable, elle est moins polluante que le solaire, l’éolien, l’hydraulique et la biomasse réunis.
Autre piste, le CO2 lui-même pourrait devenir une source d’énergie. L’entreprise suisse Climeworks a installé en 2017 la première usine capable de capturer le dioxyde de carbone dans l’atmosphère, de le nettoyer en le chauffant et de le transformer en engrais.
Ces solutions sont transposables à grande échelle et constituent de réelles pistes d’amélioration, mais leur développement nécessite des investissements financiers très importants et la mobilisation de nombreux chercheurs, autant de moyens qui ne sont pas (encore) réunis. Par ailleurs les énergies vertes ne sont pas exemptes de reproches et ont, elles aussi, un impact sur l’environnement.
De nombreuses innovations restent à trouver sur toute la chaîne – approvisionnement, stockage et usage – et auront des répercussions sur tous les secteurs de nos activités.
Cet article est extrait du Livre des tendances 2020 de L'ADN. Pour vous le procurer, cliquez ici.
L’édito de notre partenaire, Veolia
Veolia a décidé de faire de la transition énergétique une opportunité de croissance. Ses nouveaux services conjuguent performances économique, technologique et environnementale. À la clé, des gains immenses, à tous les niveaux. Veolia travaille désormais au développement de réseaux d’énergie nouvelle génération : flexibilité, pilotage en temps réel et à distance optimisé en fonction de la demande aval et de la production amont, intégration de technologies avancées (stockage, cogénération, pompes à chaleur haute performance…). Afin d’inscrire la transition énergétique dans l’approche de l’économie circulaire, le groupe lie ses services dans ce domaine avec ses autres métiers : recours à la biomasse, aux énergies issues des déchets ménagers, des eaux usées, des chaleurs perdues des sites industriels… Veolia veut produire de l’énergie verte à partir de déchets non recyclables encore sous- exploités. Avec l’essor du tri-recyclage, l’inévitable augmentation des refus de tri va permettre des alternatives aux énergies primaires fossiles. Développer ce type de solutions éviterait les émissions de gaz à effet de serre des activités amont (lors de la production et du transport du combustible fossile), mais aussi celles liées à la combustion des hydrocarbures ainsi remplacés, soit environ 500 millions de tonnes de CO 2 à l’horizon 2050. Autres combustibles prometteurs, les déchets organiques comme les boues de stations d’épuration, les déchets agroalimentaires et ceux issus de la capture de méthane sur les centres d’enfouissement, valorisés depuis quelques années en électricité et en biogaz. En France, le déploiement de la méthanisation dans toutes les STEP permettrait de dépasser de 30 % les objectifs de production de gaz vert fixés par la loi de transition énergétique, d’ici à 2030.
La production et distribution de froid renouvelable en réseaux collectifs apparaît comme un recours vertueux face à la forte augmentation des besoins de climatisation des bâtiments.
L’idée est de s’appuyer prioritairement sur les énergies les moins émettrices de gaz à effet de serre, comme la géothermie, la biomasse ou la récupération d’effluents d’eaux usées. La fin de vie des équipements photovoltaïques ou éoliens est aussi un enjeu. L’usine Veolia de Rousset, dans le sud de la France, est une première en Europe, et recyclera 4 000 tonnes en 2021, soit un taux de recyclage de 96 %. Pour Veolia, acteur majeur des territoires au travers de la gestion des services essentiels d’eau, d’assainissement et d’énergie, le pari de la transition sera gagné à la condition qu’elle soit bénéfique pour l’environnement, socialement juste et perçue comme telle.
Murat Isikveren
Vice-président Marketing, Industrie et Énergie
VEOLIA
Pour un particulier, la difficulté de raccordement d’une installation photovoltaïque au réseau représente une contrainte très forte.
C'est inexact. C'est même assez facile pour qui le souhaite.
Pour ma part j'ai 20 panneaux, consomme ce que je produis et revends l'excédent.
Je me suis fait accompagner par un prestataire.
Pour qui le veut, c'est facile sur une installation personnelle de taille raisonnable.