Les applis de fertilité ne sont pas toujours fiables, mais la GenZ leur confie son corps

Entre rejet de la pilule et quête de naturel, la contraception algorithmique séduit de plus en plus les jeunes. Mais à quel prix ?

« J’ai téléchargé une appli pour suivre mon cycle, et maintenant, je suis enceinte. » Sur TikTok, les témoignages de jeunes femmes se multiplient. Loin d’être anecdotiques, ces récits pointent une tendance de fond : la GenZ, plus méfiante envers la pilule et les hormones, se tourne vers des solutions de contraception dites « naturelles ». Parmi elles, les applications de suivi de cycle, censées identifier les périodes de fertilité à l’aide d’algorithmes et de données corporelles. Derrière l’attrait d’une solution sans effets secondaires, une réalité s’impose : ces applications, pourtant téléchargées des millions de fois, ne sont pas toujours fiables.

Les algorithmes plutôt que les hormones

La défiance envers la contraception hormonale ne date pas d’hier, mais elle s’est intensifiée ces dernières années, grâce à une sensibilisation aux nombreux effets secondaires de la pilule : prise de poids, baisse de libido, troubles de l’humeur… Autant de symptômes rapportés par des milliers de femmes et amplifiés par les réseaux sociaux, où les discussions autour de la charge contraceptive explosent.

Sur TikTok et Instagram, des influenceuses prônent le « cycle syncing » (qui consiste à adapter son mode de vie et son alimentation à son cycle menstruel) et la symptothermie (qui réside en l'observation de sa température basale et sa glaire cervicale pour déterminer sa période de fertilité). L’idée ? Reprendre le contrôle sur son corps sans subir d’intervention chimique. Les applications de fertilité s’inscrivent dans cette logique : elles promettent un suivi précis et personnalisé du cycle, en collectant nos données de menstruation. Une approche séduisante sur le papier, mais qui repose sur des algorithmes parfois approximatifs.

Pourquoi se méfier des applications de fertilité ?

Les applications de suivi de cycle peuvent être un bon indicateur, mais elles ne sont malheureusement pas assez fiables. En 2018, l’application Natural Cycles, pourtant la première à obtenir une certification médicale en tant que moyen de contraception, a fait beaucoup parler après plusieurs cas de grossesses non désirées signalés en Suède. Imane, qui utilise Flo, l’une des principales applications de fertilité en France, est formelle : « Flo est un algorithme qui se base sur les trois derniers cycles. Il ne s’agit donc que d’estimations, qui sont valables seulement si votre corps est très bien réglé. » Une simple variation hormonale, un stress, un manque de sommeil ou une maladie peut alors fausser les prédictions.

Une autre utilisatrice de TikTok a voulu tester deux applications différentes afin de choisir celle qui lui conviendrait le mieux. Et elle a fait un constat alarmant : « Il y avait des écarts sur mon jour d’ovulation entre les deux applications. Mes prochaines règles sont prévues au même moment, pourtant ma période d’ovulation n’est pas la même. » Alors laquelle croire ? Au Royaume-Uni, selon le NHS, 24 % des femmes utilisant la contraception naturelle tombent enceintes chaque année, car il est difficile de le faire correctement.

La GenZ, en explorant des alternatives plus douces, doit aussi se méfier de la gestion des données personnelles par les applications de fertilité. Un sujet d’autant plus sensible aux États-Unis, où la fin du droit fédéral à l’avortement a ravivé les débats sur la protection des informations menstruelles. Ce qui est sûr, c’est qu’en matière de fertilité, la technologie, qui nécessite une implication totale et une connaissance approfondie de son corps, a encore du mal à rivaliser avec la biologie.