Dis-moi où tu habites, je te dirais combien tu pèses ! Deux chercheuses de l’Université de Washington ont mis au point un algorithme pouvant détecter les taux d’obésité d’une population en se basant sur son environnement urbain. Leur outil analyse les cartes de Google Maps et ses « points d’intérêts » pour corréler le poids moyen des personnes avec la densité d’habitations, la présence d’espaces vert ou de structures sportive.
Alors que près de 40% de la population américaine est considérée comme obèse, (soit l’équivalant de 130 millions d’individus), les scientifiques continuent de se creuser la tête pour enrayer cette épidémie. L’un des axes de recherche consiste à relier l’environnement socio-économique et urbain des populations avec les taux de surpoids. On sait depuis longtemps que les personnes les plus riches sont moins sujettes à l’obésité, mais qu'il existe d’autres facteurs. Toutefois, les recherches sur le sujet ont tendance à donner des résultats inconstants.
C’est ce qui a motivé deux chercheuses de l’Université de Washington à mettre au point un algorithme pouvant corréler le tissu urbain avec le poids des habitants. L'intelligence artificielle a été capable de « prédire » quels sont les quartiers où le taux d’obésité est le plus élevé en se basant sur l’agencement de six grandes villes américaines et les données issues de précédentes études sur les causes du surpoids.
Une lutte contre l'obésité, quartier par quartier
Sans surprise, la corrélation la plus évidente mise en avant par l’algorithme est la faiblesse du taux d’obésité dans les quartiers les plus riches. Mais une fois ce biais mis de côté les chercheuses ont mis en évidences d’autres corrélations plus intéressantes. Ainsi le nombre d’immeubles, le type de résidence ou la présence d’infrastructures et de services liés à la santé au bien-être et au sport sont autant de facteurs ayant une influence sur le poids des habitants.
L’intérêt de cette découverte permet de détecter des zones moins riches mais dont l’architecture urbaine limite la prise de poids. Cette IA peut effectivement contribuer à affiner les politiques de luttes contre l’obésité, mais elle ne peut malheureusement pas servir sur des villes d’autres pays, à cause des différences notables dans le développement urbain. On estime pourtant que l’épidémie d’obésité est en progression au niveau mondiale et touche près de 2,2 milliards de personnes, soit environ 30% de la population mondiale.
Un élément semble pourtant récurrent dans les études menées sur la ville et le poids : il s'agit de l'usage de la voiture. L’urbaniste Jeff Speck qui a rédigé le livre Walkable City : How Downtown Can Save America, One Step at a Time, était arrivé à la conclusion que les villes privilégiant les véhicules motorisés avaient un impact négatif sur le poids de ses habitants. « Nous avons pu prouver que les villes possédant le plus de banlieues éloignées et favorisant le moins l'usage de la marche étaient celle qui avait le taux d'obésité le plus fort » avait-t-il déclaré après avoir cartographié des centaines de villes dans le monde.
Eduquer l'IA
Pour arriver à ce résultat, Ayasha Maharana et Elaine Okanyene Nsoesie ont fait appel à un RNC ou Réseau Neuronal Convolutif. Ce système est déjà utilisé pour la reconnaissance visuelle. Pour entrainer le réseau de neurones à détecter des zones urbaines spécifiques, elles lui ont donné 150 000 images satellites issues de Google Maps et Street View. En analysant de près les cartes, l’IA était capable de détecter la présence de boulevards ou de petites rues, de maisons ou d’immeubles, ou bien encore de ports de plages et de piscines. Tout ces éléments peuvent donner des indications sur les possibilités d’activités physiques. Les données étaient ensuite complétées par l’ajout des milliers de « points d’intérêts » répertoriés par Maps et regroupés en 96 catégories comme la présence d’espaces vert, de salles de sport, d’épiceries et même de boutiques d’animaux... Comme quoi balader son chien c'est quand même un peu du sport.
Crédit photo : Nathan Yau pour flowingdata.com
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