Trop d'action, pas assez de réflexion : le monde du business gagnerait à intégrer dans son modèle une profonde méditation sur les mégatendances qui façonnent notre avenir.
H-FARM, l'incubation à l'italienne
H-Farm, c’est le nom de ce lieu de 70 hectares imaginé en 2005 par deux entrepreneurs à succès, Riccardo Donadon et Maurizio Rossi. « Nous offrons une zone de confort, résume ce dernier. En tant qu’entrepreneur, tu peux te promener dans les champs, respirer au grand air, goûter la nature, observer les saisons… Ce que l’on ne peut pas faire dans les grandes villes. Les gens qui viennent ici se sentent comme chez eux : s’ils portent une cravate, ils la retirent tout de suite. »
Et alors, tous peuvent donner le meilleur d’eux-mêmes à leurs projets. Dans ses sept bâtiments, la ferme cultive des start-up de tous les secteurs : alimentation, communication, transport, santé, finance… À l’origine, il y avait uniquement un incubateur et un accélérateur mais le modèle économique n’était pas rentable. Aujourd’hui, les jeunes entreprises hébergées à H-Farm, pour des durées diverses, et leurs 550 collaborateurs travaillent tous en partenariat avec de grands groupes comme Disney, Allianz, Barilla, Adidas… Ce qui n’empêche pas H-Farm d’avoir investi 24 millions d’euros dans 86 start-up depuis 2005.
En plus du développement de start-up, H-Farm construit peu à peu un cursus d’éducation au numérique. Dans un an, le H-Campus devrait accueillir 2 000 étudiants de tous les âges, du primaire à la grande école. « Nous avons bâti le campus dans l’arrière-cour de la ferme car nous voulons un enseignement très proche du business », argumente Maurizio Rossi.
Dans cet environnement champêtre, les fondateurs disent écrire le futur. Lequel ? « Il n’y a pas de futur spécifique, répond Maurizio Rossi. Nous voulons juste permettre aux gens de mettre en œuvre leur vision, de créer. » Des leçons que les fondateurs ont déjà appliquées à leur projet H-Farm. « Reprendre une ancienne ferme, à la campagne, cela a été très disruptif, et a suscité beaucoup d’intérêt. Déjà en 2005, nous étions très conscients que la technologie allait tout changer, le monde, la société, et nous voulions trouver un moyen d’y participer. Le choix de cet environnement a été excellent, et il nous donne de l’énergie depuis le premier jour. »
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Menorca Millennials, le décélrateur de startups
Aujourd’hui, Menorca Millennials fonctionne à plein : un programme de 15 jours qui réunit sur l’île aux allures paradisiaques 20 start-up, sélectionnées parmi 360 candidatures reçues de 60 pays.
« Ici ma créativité est multipliée par 1 000, c’est fou ! s’enthousiasme Marcos Martin, insulaire toute l’année. Créer dans les grandes villes, dans un bureau, avec des plannings quotidiens, ce n’est pas le meilleur plan. Alors qu’à Menorca, tu te connectes à une nouvelle dimension, la quatrième, ou la cinquième, je n’en sais rien, mais quoi qu’il en soit, ta créativité grimpe en flèche. »
Les jours s’organisent entre réunions d’équipe, conférences informelles dans le patio (où tout le monde doit rester pieds nus), randonnées à vélo, plongée sous-marine. Marcos Martin prend l’exemple de la start-up Verse : « Au début, ils voulaient commercialiser une machine pour retirer du cash à partir de comptes en bitcoins. Après les Millennials, ils ont finalement choisi de concevoir une application de transfert d’argent entre particuliers. »
Tout au long du séjour, les entrepreneurs rencontrent d’autres entrepreneurs à succès ainsi que des investisseurs. « Quand on investit, on parie plus sur le jockey, l’entrepreneur, que sur le cheval, le business model. Et à Menorca, on peut réellement se connecter au niveau humain. Nous appelons cela la due diligence humaine. » Et cela porte ses fruits : sur les trois éditions, les participants ont levé un total de 29 millions d’euros.
Une fois la quinzaine finie, la communauté persiste grâce à des dîners aux quatre coins du monde, et à des échanges réguliers. Mais l’expérience sur Minorque crée aussi d’autres connexions plus ineffables. « Un soir, on se promenait sur l’île à trois avec Paul Ford et John Keagy [deux figures de la Silicon Valley, N.D.R.]. On est entrés dans une base désaffectée de l’US Navy, et c’était comme si l’on avait voyagé dans le temps cinquante ans en arrière. C’était au moment du coucher du soleil. On a regardé l’horizon. On se sentait petits, humains. Entre nous, j’ai ressenti à ce moment-là une connexion presque chimique. »
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thecamp, hybridateur de talents
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