Zoom sur la couverture d ela BD Verts de rage, les enfants de plomb

Parler sciences et climat en BD : l'enthousiasme des chercheurs (et du public)

© Michel Lafon, Vert de rage, Les enfants de plomb

Depuis le succès du Monde sans fin de Jancovici et Blain en 2021, la BD scientifique est un genre à part entière qui sert à vulgariser et à lutter contre la désinformation.

La place de l'énergie dans les sociétés futures, la difficile cohabitation des humains avec le monde sauvage, ou encore les travaux du GIEC. Ces thèmes étaient centraux dans de nombreux ouvrages présents au festival international de la BD (FIBD) d'Angoulême cette année. Certains ont dépassé le million de ventes, mais tous ont un point commun : ils parlent de science.

Des scientifiques « très enthousiastes »

« Personnellement, même si je n'ai aucune formation, la science m'a toujours attiré », raconte Jim Jourdane, auteur présent à Angoulême. « C'est ma curiosité qui m'a poussé à m'y intéresser et à parler à des scientifiques. » Il dédicace ses Mésaventuriers de la science paru en 2017 et réimprimé pour la quatrième fois à la suite du succès. Il y aborde avec humour des anecdotes vécues sur le terrain par des chercheurs ou des chercheuses, avec à chaque fois un volet plus « documentaire » qui vulgarise certaines connaissances. « Au début, je me basais sur des histoires lues sur Twitter, mais aujourd'hui, des scientifiques me contactent pour me raconter leurs anecdotes. Ils sont souvent très enthousiastes à l'idée de parler de ce qu'ils font. »

Dans les gros succès de la BD scientifique, on compte Jean-Marc Jancovici. L'ingénieur impliqué dans la lutte contre le changement climatique a bouleversé le secteur avec Le monde sans fin, plus grosse vente en BD de l'année 2022 et sans cesse réimprimée depuis, avec plus d'un million d'exemplaires vendus. Drôle et correspondant parfaitement au média, cette bande dessinée aborde pourtant des thématiques extrêmement techniques autour du nucléaire, de notre rapport à l'énergie ou des conséquences du changement climatique.

En 2024, d’autres BD scientifiques ont attiré les lecteurs. Parmi elles, Horizons Climatiques, dédiée au fonctionnement du GIEC, écrite par la climatologue Iris-Amata Dion, et avec la participation de nombreux auteurs des rapports comme Valérie Masson-Delmotte ou Christophe Cassou.

« Certaines connaissances doivent être portées auprès du plus grand nombre »

« Notre travail, en tant que scientifique, c'est aussi de transmettre », assure Sofia Kabbej, chercheuse au pôle Climat, énergie et sécurité de l'Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS), et membre du jury Eco-Fauve d'Angoulême. « La BD est particulièrement intéressante car elle permet une narration nouvelle, des audaces visuelles… Autant d'outils qui peuvent aider à communiquer, mais sans forcément sacrifier la nuance et la complexité d'un sujet. »

Elle-même ayant peu de connaissances en BD, elle a pu, en tant que jury, apprécier des œuvres très diverses aux côtés de certains de ses pairs ou de personnes un peu plus « calées », ce qui lui a montré l'étendue des pouvoirs de ce média. Certains scientifiques, comme Jean-Marc Jancovici, sont si impliqués qu'ils sont coauteurs de ces livres. « Actuellement, je travaille sur un projet avec une anthropologue en coautrice, précise Jim Jourdane. C'est une collaboration, avec des échanges où je m'assure que mon travail correspond bien à la réalité de ce qu'elle me raconte, c'est une tout autre approche. »

« Ce qui est capital, ajoute Sofia Kabbej, c'est que certaines connaissances doivent être portées auprès du plus grand nombre. C'est surtout le cas quand on parle de climat, c'est quelque chose qui nous concerne tous. »

Pour les chercheurs et les chercheuses, la question est d'autant plus importante que le relativisme autour des questions environnementales gagne du terrain. « C'est là que nos BD peuvent aider, assure Jim Jourdane. Avec elles, on peut davantage s'identifier aux scientifiques, et mieux comprendre leur démarche. L'humour est une bonne porte d'entrée. »

Cette année, le jury de Sofia Kabbej a primé Vert de rage, Les enfants du plomb, une œuvre illustrée par Sébastien Piquet et portée par le journaliste Martin Boudot, connu pour ses documentaires scientifiques et ses livres autour des scandales de la pollution et des atteintes à l'environnement. C'est dans la BD qu'il a trouvé une nouvelle manière de s'exprimer.

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