Trois filles font la fête tout en paillettes

Amour, paillettes et pop sucrée : les concerts se transforment en pyjama parties

Les pop stars se réapproprient des codes féministes et queer et proposent un cadre de liberté à des fans qui veulent des « espaces où l’on peut être soi-même ».

« J’avais l’impression d’être à un pique-nique entre copines. Tout le monde était déguisé, portait des bijoux, des fleurs et des paillettes dans les cheveux… On s’échangeait des bracelets d’amitié. » Un an après avoir assisté au concert de Taylor Swift à Lyon – en juin 2024 – Héloïse s’en souvient « comme si c’était hier ». Pour cette « immense fan » de l’artiste américaine, pas de doute : « Ce spectacle, c’est quelque chose que je n’ai jamais vécu ailleurs. »

« Au milieu d’une foule, sans crainte de jugement »

Public bienveillant, liberté vestimentaire et de ton. Depuis plusieurs années, les pop stars remettent au goût du jour des codes féministes et queer dans leurs concerts. Marchant dans les pas de Taylor Swift, les reines des charts – Chappell Roan, Charlie XCX, Olivia Rodrigo pour ne citer qu’elles – ont fait de leurs shows de « nouveaux espaces d’empouvoirement », estime Marine Lambolez, sociologue spécialisée dans les goûts culturels des adolescents. « Dans leurs concerts, on profite de beaucoup de choses généralement moquées : les paillettes, le rose, les couleurs flashy… Ils ouvrent un espace où l’on peut être soi-même au milieu d’une foule, sans crainte de jugement. »

Preuve à l’appui : en mars 2025, l’ancienne star de Disney, Sabrina Carpenter, a donné deux concerts à Paris, à guichets fermés. Dans la foule, pas de pogos, mais une majorité de jeunes femmes vêtues de jupes et de robes courtes, inspirées par leur idole. « J’aime l’image qu’elle se donne : sexy, féminine, assumée. Elle revendique sa féminité pour elle, pas pour le regard des hommes », s’amuse Lou, Bordelaise de 24 ans. « Je me retrouve en elle. Son maquillage, sa coiffure, ses tenues… », abonde Camille, 25 ans, elle aussi présente au show de Carpenter. « Pour son concert, je portais une robe assez courte, avec des talons. Dans un autre contexte, où l’on n’aurait pas été en majorité des femmes, pas sûre que je me sois habillée de la même manière. »

« Elles ne revendiquent pas uniquement une image de femmes fortes »

En investissant les salles de concert avec ces codes, les jeunes femmes s'approprient un peu plus l'espace public. Et découvrent d'autres manières de se raconter, à travers les paroles des tubes qu'elles représentent. « L'un des points forts de ces artistes est leur qualité d'écriture, analyse Morgane Giuliani, journaliste et autrice de Féminismes et musiques - La pop de Madonna à nos jours (éd. Le Mot Et Le Reste, 2023). Dans leurs textes, elles ne revendiquent pas uniquement une image de femme forte qui ne se laisse jamais faire. Elles montrent plusieurs facettes de la féminité, de la personne que l'on peut être à différents moments de sa vie. Ce sont des pop stars aux discours nuancés et intimistes. »

C’est ce qu’apprécie Camille : « Dans Sharpest Tool (Le couteau le plus aiguisé du tiroir, ndlr), Sabrina Carpenter raconte ces relations de la vingtaine, pas vraiment définies, dans lesquelles on ne ressent pas la même chose des deux côtés, et on n’en parle pas. C’est un vrai coup de cœur. »

Longtemps méprisées, ces bulles de liberté font encore l’objet de critiques : les pop stars se voient parfois reprocher un féminisme de façade. « Bien sûr, nous pourrons toujours trouver des choses à reprocher aux artistes : surfer sur la vague pour être bien vues ? Se déplacer en avion pour les tournées ? Jouer le jeu du capitalisme ? Ok, avance Chloé Thibaud, journaliste et autrice de Ni muses ni groupies – Une histoire féministe de la musique (éd. Leduc, 2025). Une femme artiste risque encore davantage en défendant des messages féministes qu’en gardant le silence. »

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