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Transparence et éthique : la nouvelle équation de l’expérience client

© Jacob Wackerhausen

Algorithmes de recommandation, personnalisation poussée, intelligence artificielle : à mesure que l'expérience client se sophistique, les utilisateurs exigent plus de transparence. Un paradoxe apparent qui révèle une transformation profonde de la relation entre marques et consommateurs.

À mesure que les technologies affinent la personnalisation des services, une forme de tension s’installe dans la relation client. Plus les parcours sont fluides, plus la demande de transparence s’intensifie. Ce que les utilisateurs recherchent aujourd’hui, c’est une expérience qu’ils comprennent, qu’ils choisissent, et à laquelle ils peuvent consentir pleinement. 

Clarisse Blanc, Directrice Communications de MatchGroup Europe, résume ce basculement : « Aujourd’hui, les utilisateurs ne sont plus dupes. Ils savent que leurs données ont de la valeur. Ce qu’ils veulent surtout, c’est savoir à quoi ça sert, et s’ils peuvent choisir. »

Quand la confiance exige un nouveau langage

Cette quête de maîtrise n’est pas qu’une posture, elle est massive et chiffrée. Selon une récente étude Usercentrics, 63 % des consommateurs estiment que les marques ne sont pas assez transparentes sur l’usage de leurs données personnelles. Pour Clarisse Blanc, cette attente prend une intensité particulière dans des secteurs où l’intimité est en jeu. « C’est un secteur où on est vulnérable. On touche à l’intime. Même si on ne se dévoile pas complètement, tout ce qu’on partage, que ce soit avec la marque ou avec d’autres utilisateurs, doit se faire dans un cadre clair. »

Dans ce contexte, le jargon juridique devient un repoussoir. L’enjeu n’est plus de se protéger derrière des clauses complexes, mais d’ouvrir le dialogue. Chez Meetic, cette conviction a mené à un chantier de fond : déconstruire la politique de confidentialité pour la réécrire dans une langue que tout le monde peut comprendre. « On s’est dit : souvent, quand on va lire une politique de confidentialité, c’est incompréhensible, c’est du jargon pas possible, explique Clarisse Blanc. Nous, on a voulu quelque chose de lisible, de simple, où l’on vous dit dès le départ pourquoi on collecte vos données, dans quel but, et ce que vous pouvez choisir de partager ou non. »

Un cadre européen structurant

Loin d'être un carcan, le cadre réglementaire européen (RGPD, DSA) s'est révélé être un véritable accélérateur  pour le groupe Match « Le RGPD a changé les choses, et le DSA renforce cette dynamique. Ce qui nous paraissait contraignant est devenu une source d’inspiration pour les autres entités du groupe, notamment aux États-Unis », indique Clarisse Blanc.

L'obligation de publier un Transparency Report dans le cadre du Digital Services Act a notamment servi d’électrochoc, révélant les écarts de pratiques entre les marques. « On a pu constater que Meetic avait déjà des standards très élevés. Cela nous permet aujourd’hui de partager nos bonnes pratiques à l’échelle internationale. »

IA et personnalisation : accompagner sans enfermer

L’intelligence artificielle promet une expérience client d’une précision inédite. Mais sa performance ouvre une autre question : à force de simplifier, d’anticiper chaque attente, la technologie ne risque-t-elle pas de rendre le parcours si fluide que la part de choix s’amenuise ? « On réfléchit vraiment sous deux aspects : comment l’IA peut améliorer l’expérience utilisateur, et comment elle peut aider à lever certains freins poursuit Clarisse Blanc. Il y a des gens qui ne savent pas comment se présenter, qui n’osent pas se lancer. Une IA peut les aider, sans faire les choses à leur place. »

C’est là, selon elle, que réside le véritable enjeu. Pour préserver l’autonomie, la marque a fixé une règle simple : l’utilisateur doit pouvoir garder la main, reprendre la maîtrise de son parcours à tout moment. « La personnalisation ne doit pas être rigide. Il faut que ce soit réversible, que ça puisse évoluer. Si quelqu’un veut changer ses critères ou tester autre chose, il faut que la plateforme s’adapte, pas l’inverse. »

La confiance repose sur des preuves

D'autre part, la question de la sécurité est centrale. Dans un écosystème où les applications freemium sont nombreuses, Meetic mise sur la fiabilité et la sûreté comme leviers de différenciation. « La confiance, c’est la pierre angulaire. Si les gens ne se sentent pas en confiance, ils ne donnent rien d’eux-mêmes. Et si on ne donne rien, il ne peut pas y avoir de rencontre », affirme Clarisse Blanc.

Cette exigence se manifeste dans les outils de modération. Ainsi, Meetic indique détecter et bloquer 90 % des faux profils en moins de 24 heures, grâce à une combinaison d’algorithmes avancés et de modérateurs humains. « Ce sont des outils puissants qui repèrent les comportements suspects (connexions trop rapides, messages envoyés en masse) et nous permettent d’intervenir vite. L’IA pourrait nous aider à aller encore plus loin, mais on veut garder le contrôle humain. »

Vers une expérience explicable, fluide et choisie

Ce que les utilisateurs attendent aujourd’hui, ce n’est pas seulement que l’expérience fonctionne. C’est qu’elle fasse sens. Que les critères de recommandation soient compréhensibles. Que les options soient claires. Que les outils ne prennent pas le dessus sur leurs préférences.

« Ce qui pouvait être vu comme un sujet accessoire il y a quelques années, une marque éthique, un peu « engagée », aujourd’hui, c’est presque un prérequis. Si ce n’est pas là, on n’y va pas », observe Clarisse Blanc. Même dans un secteur où la fidélité n’est pas un enjeu en soi… « Notre but, c’est que les célibataires se rencontrent et qu’ils nous quittent. Car la confiance reste essentielle. Elle conditionne tout. »

À l’heure où l’automatisation devient la norme et la personnalisation une attente de base, la différence ne se joue plus sur ce que les marques peuvent faire… mais sur ce qu’elles choisissent de faire, et comment elles le font comprendre. 

Entre raison algorithmique et émotion humaine, il s’agit moins d’optimiser l’expérience que de lui redonner du sens. C’est à cette frontière mouvante entre pouvoir, devoir et désir, que s’invitent aujourd’hui les réflexions les plus fécondes sur l’avenir de la relation client. Elles nourriront notamment les échanges de la prochaine édition de One to One IA x Expérience Client du 30 septembre au 2 octobre à Biarritz. Un moment où les professionnels de l’IA et de l’expérience client confronteront leurs visions, entre innovation et responsabilité.

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