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Rêves lucides et espaces liminaux : Glumlot, l’artiste qui utilise l’IA comme « une machine à mémoire »

Cet artiste utilise l'aspect bizarre des IA pour créer des œuvres dérangeantes et oniriques.

Châteaux hantés en technicolor, forêts mystiques inspirées des rêves de Jodorowsky, ou stations thermales et aires de jeux liminales... Quand on découvre le compte TikTok de Glumlot, on est pris d’émerveillement. Ce réalisateur, qui travaille dans le milieu de la publicité et du documentaire, produit ce qu’il appelle des « poèmes d’ambiance étrangement familiers » grâce à plusieurs outils d’intelligence artificielle. Loin de l’absurde course à l’image ultraréaliste à laquelle se livrent beaucoup, Glumlot cherche à provoquer nos émotions. Le pari est gagnant - il a déjà reçu plus de 1,2 million de likes et séduit 92k followers sur TikTok (et 91k sur Instagram).

Glumlot suit depuis longtemps les évolutions techniques grâce à son métier. « Dans mon agence, on utilisait ShotDeck, une plateforme Web qui est une immense bibliothèque de plans fixes tirés de toutes sortes de films, explique-t-il. En tant que réalisateur, le plus grand défi est de réussir à transmettre visuellement ce que l'on a en tête, à un client ou à un partenaire créatif. Cet outil nous aidait à construire des storyboards, entre autres. Dès que MidJourney est sorti, je l’ai aussitôt adopté, car il permet d’obtenir ce que l’on cherche de manière précise, jusqu'au grain du film, à l'éclairage. Et puis l’agence a fermé et je me suis trouvé face à un vide créatif. J’ai continué à utiliser l’IA pour expérimenter. C'est avec Runway (une plateforme permettant de mettre en mouvement des images générées par IA, ndrl) que je compose maintenant mes petits clips de 30 secondes à une minute qui me font l’effet d’un poème visuel. »

Recréer des rêves lucides

Les vidéos de Glumlot ne racontent pas vraiment d'histoire. Elles créent avant tout une atmosphère. « Beaucoup de créateurs semblent utiliser l’IA pour mettre en avant les nouvelles technologies. Je ne suis pas particulièrement attiré par elles, je suis même un peu un luddiste, pour être honnête, indique-t-il. Ce qui m’intéresse, c’est de susciter des émotions. »

Des émotions qui ressemblent à des rêves, lui dit-on. Glumlot sourit d’un air satisfait. « C’est exactement ce que je veux faire. Je suis un rêveur lucide naturel. Depuis environ cinq ans, j'ai commencé à explorer cette pratique. J'ai acquis beaucoup de contrôle sur mes rêves, au point de pouvoir entrer dedans avec une intention précise. Dans ces moments-là, mon esprit crée des images que je serais incapable de reproduire en étant éveillé. Si je parviens à m'en souvenir, je les utilise comme source d'inspiration. L'élément central de mon travail réside dans cet aspect onirique avec une grosse touche de nostalgie en plus. »

L'IA, notre nouvelle mémoire ?

Le succès de Glumlot sur les réseaux vient sans doute aussi de l'utilisation qu'il fait des espaces liminaux. « Certaines personnes ressentent un malaise, un sentiment d’inconfort avec ces images. Pour moi, la première fois que j'en ai vu, elles m'ont provoqué une grande paix. Quand un médium — que ce soit l'IA ou les espaces liminaux — suscite des réactions si polarisées, c'est qu'il y a quelque chose de vraiment spécial dedans. D’ailleurs, je pense que l'engouement pour ces esthétiques n’est pas une simple tendance. C'est quelque chose que nous venons seulement de nommer, mais qui a toujours existé. »

Les technologies de l'IA pourraient-elles nous montrer des choses connues sous un angle nouveau ? C'est la conviction de Glumlot. « Pour moi, ces outils de génération d’image sont une sorte de machine à mémoire, dit-il. En tant que créateurs, nous puisons tous dans nos inspirations, dans des choses que nous avons vues ou entendues et qui nous ont touchés. Jusqu'à présent, nous avons utilisé uniquement notre mémoire personnelle pour cela. Mais maintenant, nous avons ces outils qui sont en quelque sorte une mémoire parfaite, qui réunit des éléments pour en composer sans cesse de nouveaux. Je pense qu’il faut explorer tout ce côté étrange, un peu comme avec ces vidéos de Will Smith qui mange des spaghettis. »

David-Julien Rahmil

David-Julien Rahmil

Squatteur de la rubrique Médias Mutants et Monde Créatif, j'explore les tréfonds du web et vous explique comment Internet nous rend toujours plus zinzin. Promis, demain, j'arrête Twitter.

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commentaires

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  1. Avatar Anonyme dit :

    Pas de l'art

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