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Corée du Sud : quand l’art et la créativité font du handicap une source d’inspiration

Avec MYSC
© MYSC

De passage à Paris en septembre, une poignée de startups sud-coréennes ont démontré comment la technologie et la créativité pouvaient s’unir pour transformer les contraintes du handicap en leviers créatifs, et ainsi redéfinir les contours d'un art plus accessible.

À l’occasion du K-Digital Art Night dans le cadre de France Discovery Program, organisé à la galerie Artverse, quelques jeunes pousses de la tech sud-coréennes comme KIMU Studio, Another Day et LUPL ont rencontré journalistes, investisseurs et partenaires potentiels. Sélectionnés sur le volet, ces projets partagent la même ambition  : placer l’art et l’inclusivité au cœur de leur business model. MYSC (Merry Year Social Company), le plus grand investisseur dans les projets sociétaux en Asie, a conduit cette délégation avec le soutien de KAMS (Korea Arts Management Service) sous l’égide du Ministère de la Culture, des Sports et du Tourisme de Corée du Sud. Deux autres start-ups innovantes, BucketTravel et ShiningLab, complètent ce cortège venu de l’Asie de l’Est.

Une autre facette de l’art numérique sud-coréen

« En Corée, le gouvernement contribue déjà au développement de ce type de projet, sachant bien que l’élan vers les nouvelles technologies est un atout pour l’avenir du pays », explique Kian Ban, responsable local de ce programme. Pour lui, l’art numérique fait partie des secteurs les plus dynamiques du paysage économique du pays : « Les Coréens sont obsédés par la technologie, et ont le souci de se hisser au niveau des plus avant-gardistes dans de nombreux secteurs. L’art numérique ne fait pas exception ». Le marché sud-coréen de l'art en ligne pèse déjà lourd : il devrait atteindre environ 505,7 millions USD d’ici à 2033, avec un taux de croissance annuel composé (CAGR) de 8,2 %. « Ils ne sont pas là que pour faire affaire » insiste Kian Ban. Réunis dans cette galerie parisienne, ces entrepreneurs souhaitent incarner cette facette moins connue de l’art numérique sud-coréen, où innovation et créativité riment avec impact social. « En Corée, comme dans de nombreux pays, l’art n’est pas assez accessible. On a besoin de solutions concrètes pour que le secteur soit véritablement inclusif ». C’est précisément dans ce creux - entre avant-garde technologique et défi de démocratisation des pratiques artistiques - que se positionnent ces startups.

L’inclusion comme moteur créatif

C’est le fil rouge des projets présentés : faire de l’inclusion un moteur de créativité artistique. L’agence créative LUPL, dirigée par Hui Eun Lee, en est l’exemple. La fondatrice raconte avoir écumé les écoles spécialisées, à la recherche de talents cachés : « Je pars du principe que tous les jeunes, même en situation de handicap, ont un potentiel artistique qu’il faut développer le plus tôt possible ». Depuis, LUPL accompagne ses artistes de la découverte jusqu’à la valorisation internationale, avec des projets numériques qui s’appuient sur des capteurs de mouvements ou des modules interactifs permettant, par exemple, à des personnes tétraplégiques de peindre en déplaçant leur fauteuil électrique. Le succès a été immédiat : « J’ai lancé un concours et j’ai reçu plus de 400 candidatures ».

Même conviction du côté de KIMU Studio. Son fondateur, Jangwon Nam, raconte avoir été marqué par ses années de bénévolat auprès de personnes en situation de handicap neurologique : « Un jour, l’un des patients avec qui je travaillais dessinait avec un talent incroyable, c’était mieux que Picasso (rires). Ça m’a profondément marqué ». De cette expérience est né son studio qui collabore aujourd’hui avec des géants comme Samsung ou LG, et promeut auprès d’eux l’emploi de personnes handicapées dans les métiers de la création et du design. « L’idée, c’est que leurs propositions artistiques puissent être reconnues et valoriséesau même titre que le travail d’un artiste valide », insiste-t-il.

Dans un autre registre, Another Day explore le potentiel de l’art olfactif. Sa fondatrice, Jieun Kim, explique : « Dans ma famille, certaines personnes sont daltoniennes. En tant qu’artiste, je voulais qu’elles puissent comprendre mon travail. C’est de là qu’est venue mon idée ». Son produit phare, Aroma Art, permet aux personnes daltoniennes et malvoyantes de peindre avec des couleurs identifiables par l’odorat, qui restent perceptibles même une fois l’œuvre sèche. Une passerelle inédite entre art et perception, qui transforme la contrainte en expérience sensorielle et créative partagée.

En donnant une place aux talents trop souvent invisibilisés, ces start-ups sud-coréennes incarnent  une démarche qui dépasse la simple expérimentation : elle devient un secteur économique à part entière, porté par des entrepreneurs qui ont compris que la diversité des parcours et des expériences était un gisement créatif inexploré. Reste que ces innovations sud-coréennes émergent dans un contexte particulier : un marché domestique très technophile et des politiques publiques volontaristes. Leur transposition en Europe devra compter avec d'autres réalités économiques et culturelles. Une dynamique que l'écosystème créatif européen aurait tout intérêt à observer de près, pour y puiser ses propres voies d'innovation inclusive.

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