Part belle au contenu pédagogique, place croissante du jeu vidéo, image de soi plus protégée… Sur les réseaux, la génération Alpha renouvelle les codes.
Ils sont jeunes, et ils sont nés avec un smartphone entre les mains, mais sont-ils forcément « brain rot », ce terme qui renvoie au pourrissement du cerveau dû à une consommation excessive de contenus abrutissants ? Contre toute attente, la génération Alpha (les juniors nés entre 2010 et 2025) ferait un usage bien plus contrôlé et constructif des réseaux sociaux que leurs aînés.
Publier des photos, « c’est gênant »
Un feed Instagram vide, surplombé de nombreuses stories « à la une », très travaillées et organisées par code couleur, ou réunies sous des smileys savamment choisis. C’est probablement ce qui vous attend sur le compte – souvent privé – de votre neveu, nièce ou petit-cousin Gen Alpha. Et pour cause : publier des photos est devenu has been, et tout jeune qui se respecte évite soigneusement de partager des posts, au risque d’être « gênant ». Cet usage très maîtrisé est bien éloigné des feeds à l’esthétique léchée des millennials et des « photo dumps » faussement spontanés des GenZ…
Et cela n’a rien d’étonnant pour Anne Cordier, chercheuse en sciences de l’information et de la communication et spécialiste des usages des médias par les jeunes générations : « Ils sont hyperconscients de leur image en ligne et mettent beaucoup de distance avec la représentation de soi. » Une petite victoire pour les campagnes de sensibilisation sur le sujet ? Aussi, tout simplement, une question de transmission, entre jeunes et transgénérationnelle. « Il ne faut pas oublier qui sont les parents de ces enfants : ce ne sont plus des adultes largués avec le numérique, ils ont connu tout cela et sont d’ailleurs un peu partis tous azimuts sur les réseaux, ce qui fait qu’ils peuvent parler de leur expérience. »
Une complémentarité entre les différentes longueurs proposées
Comme leurs parents millennials, les Gen Alpha sont avides de contenus toujours plus courts. Sur TikTok, via les Reels Instagram et les Shorts YouTube, ils consomment des milliers de microvidéos de quelques secondes à une minute environ. Mais ce n’est pas tout. Ils ont la particularité de « construire une complémentarité entre les longueurs de contenus disponibles », d’après Anne Cordier. Ils sont aussi très demandeurs de formats longs éducatifs sur des sujets qui les intéressent, de l’astronomie à l’histoire géopolitique, en passant par la composition musicale : « Certains regardent des vidéos de trois à quatre heures ! »
Les jeux vidéo, des réseaux sociaux comme les autres
Autre caractéristique bien à eux : la consommation marquée de contenus liés aux jeux vidéo, via des « Let’s Play » (parties commentées), des « walkthroughs » (guides pas à pas d’un jeu), des streams et des vidéos de création ou de personnalisation d’avatars, de mondes virtuels. « Ils parlent beaucoup de contenus gaming, c’est quelque chose de beaucoup plus diffusé » que chez leurs aînés, confirme Anne Cordier. Inventifs, les Gen Alpha détournent même certains jeux vidéo pour en faire de véritables réseaux sociaux 3.0 : c’est le cas de Fortnite, et surtout de Roblox, grâce au chat. Le signe, pour la chercheuse, de leur besoin de lien et d’un certain « sentiment de solitude ».
Détournement de tendances
En réinterprétant certains mots et tendances connus de leurs aînés, les Gen Alpha s’inscrivent dans un « jeu de dialogue et de réappropriation des codes » d’une génération à l’autre, pour Anne Cordier. Dernier objet de discorde, porté en étendard sur TikTok par des dizaines de parents millennials : le terme « preppy », renvoyant pour eux à une esthétique classique mais, pour leurs enfants, à un style flashy et haut en couleur.
Ceci est vrai les jeunes trouve tout gênant et passe leur temps sur leur portable malheureusement