Philippe Boxho, le médecin légiste préféré de TikTok

Avec son incroyable gouaille et son sens du détail gore, ce spécialiste de médecine légale fait un carton sur TikTok et dans les librairies. 

« La pire mort pour moi, c’est d’être écrasé par un train. Si tu es allongé, tu es coupé en morceaux et tu te vides de ton sang. Si tu es assis, le train t’explose le haut du corps. Et si tu ne veux pas le voir arriver parce que tu es de dos, ça projette tous les organes sur des dizaines de mètres. Je me suis amusé à ramasser un visage une fois, c’était marrant. » Si d’aventure vous aimez les témoignages chocs et les histoires vraies très, très gores, Philippe Boxho en a sous le chapeau. Ce médecin légiste belge, auteur de deux ouvrages sur les anecdotes de son métier, cartonne en librairie et sur les réseaux.

Nouveau venu dans le jeu médiatique

Il faut dire que le personnage a une gouaille incroyable et un art de raconter des histoires terribles avec un détachement amusé. De quoi titiller notre curiosité morbide et remplir les compteurs de vues. Sur TikTok, ses vidéos ont déjà cumulé plus de 13 millions de vues tandis que sur YouTube, ses diverses interviews dépassent les 8 millions de vues. Pourtant, il doit sa récente notoriété à un coup de hasard. « Un journaliste de la RTBF est venu me voir pour une interview sur la déontologie, car j’étais vice-président du Conseil national de l'ordre des médecins en Belgique, raconte-t-il. Et pendant qu’on installe le matériel, il m’a demandé ce que je faisais dans la vie. Quand je lui ai répondu que je faisais de la médecine légiste, il m’a tout de suite demandé des anecdotes. J’en ai évidemment plein. Après deux ou trois histoires, il m’a demandé d’enregistrer un podcast pour le mettre sur la chaîne Facebook de la RTBF. La vidéo a fait 10 millions de vues et un éditeur m’a contacté dans la foulée pour écrire un livre. » Ses deux ouvrages :  Les morts ont la parole et Entretien avec un cadavre : Un médecin légiste fait parler les morts se sont vendus à plus de 35 000 exemplaires chacun en Belgique francophone. Un véritable succès de librairie que son éditeur Kennes tente de reproduire en France.

« Ça permet de faire connaître mon métier »

Encore nouveau venu dans ce jeu médiatique, Philippe dit ne pas accorder trop d’importance aux chiffres même s’il les cite avec fierté. « Ce sont mes enfants et ma femme qui surveillent ça de près et qui viennent me raconter, indique-t-il. Moi je m’en fiche un peu, je suis juste content que ça fonctionne bien pour mes livres, mon éditeur et les gens qui m’interviewent. » C’est peut-être justement cette fraîcheur face caméra qui fait le sel de ses anecdotes. « Ça m’amuse beaucoup de raconter ces histoires, précise-t-il. Tout d’abord ça permet de faire connaître mon métier et de montrer à mon gouvernement qu’on sert à quelque chose et qu’on a besoin de plus de moyens. Ensuite, j’aime beaucoup évoquer le sujet de la mort, car elle fait partie de ma vie et c’est un tabou qu’il faut lever. On va tous mourir un jour et il vaut mieux en rire que d’en avoir peur. »  Cette décomplexion face à la mort ajouté au vernis authentique de ses anecdotes ne pouvait que cartonner sur TikTok, une plateforme où les utilisateurs aiment se faire peur en jouant avec la frontière entre fiction et réalité.

Concours d'anecdotes gores

On a bien compris que notre médecin légiste badine avec la mort. Mais de là à raconter des anecdotes sanguinolentes à coups de tripes arrachées et de tête coupée, est-ce que le docteur Boxho ne va pas trop loin ? La question mérite d’être posée, d’autant que ses extraits d’interviews circulent sur TikTok, une plateforme dont les algorithmes peuvent montrer des images ou des histoires choquantes à un public jeune et impressionnable. Face à cette interrogation, Philippe Boxho estime que ce qu’il raconte reste moins impressionnant que ce qu’on peut voir en fiction. « Il y a suffisamment de choses horribles sur Internet et même à la télévision pour remplir ce rôle, indique-t-il. Mes histoires sont vraies sur le plan médico-légal et je m’amuse avec la mort pour mieux l’affronter. En revanche, je ne rigole jamais des morts. » Reste que le médecin légiste présente une mutation radicale du traitement journalistique des faits divers et du « true crime ». S’il reconstitue dans ses livres la vie des personnes qui sont passées sur sa table d’autopsie, les formats imposés par les plateformes vidéos tendent à transformer cet exercice délicat en concours d’anecdotes sordides. Forcément, on y perd un peu.