mister beast et une explosion de dollars

Comment la téléréalité brutale de Mister Beast symbolise la guerre des générations

© Amazon prime

Jugée comme un « spectacle indigne » par les critiques télé, l'émission Beast Games oppose très souvent de manière cruelle la jeunesse idéaliste et sensible à des quinquagénaires plus pragmatiques.

Regarder les productions de Mister Beast et les voir prendre de plus en plus de place dans notre paysage médiatique dit quelque chose de notre rapport à la cruauté télévisuelle. Avec son budget de plus de 100 millions de dollars, le jeu télévisé Beast Games, qui a débarqué sur Amazon Prime depuis quelques semaines, est déjà considéré comme l’émission la plus folle et la plus brutale de notre époque. Plus ou moins calquée sur la série Squid Game, l’émission voit s’affronter 2 000 candidats pour des prix dont la somme dépasse les 15 millions de dollars.

Crise de nerfs et cupidité

Jugée « indigne et cruelle » par les critiques professionnels, le show récolte une moyenne de 13 % sur le site de référence Rotten Tomatoes. Il faut dire que le programme est intense, avec des épreuves physiques difficiles (comme jouer à cache-cache avec des Navy Seals) et surtout mentales. Isolation pendant plusieurs jours dans des pièces fermées, choix cornéliens entre partager de l’argent avec son équipe ou bien la trahir et empocher le gros lot, et jeux de hasard pour permettre aux spectateurs d’avoir leur lot d’émotions fortes. C’est justement sur ce point que s’arrête The Hollywood Reporter, qui note la différence de comportement entre les jeunes participants d’une vingtaine d’années et des personnes appartenant à la génération X, plus âgées.

Alors que la première catégorie est volontiers dans le registre de l’émotion et de l’entraide, la seconde se montre plus individualiste et « pragmatique ». On ne compte plus les jeunes hommes et femmes en sanglots, roulés en boule à cause d’un échec à l’une des épreuves, tandis que les plus âgés trahissent sans vergogne leur équipe pour gagner plus d’argent. Les conséquences de ces choix sont d’ailleurs parfaitement mises en scène pour montrer les débordements des effets de groupe. Ceux qui acceptent l’argent contre leur équipe sont vertement réprimandés par leurs coéquipiers, tandis que ceux qui hésitent à partir avec 1 million de dollars sont mis sous pression pour ne pas accepter et continuer l’aventure.

La cruauté, c'est fun

Plus que la solidité mentale ou physique, ce sont aussi les valeurs morales et le rapport à la cupidité qui sont ici testés. Et qui dirait non à 1 million de dollars dans un monde où un simple inhalateur contre l’asthme coûte plus de 500 dollars ? De quoi interroger plus en profondeur l’aspect éthique des shows de Mister Beast (les participants ont vraiment besoin de cet argent) et le manque général d’empathie du personnage, qui les gère au mieux comme des cobayes, au pire comme du bétail (cinq candidats ont porté plainte pour mauvais traitements lors de la première partie de l’émission à Las Vegas). Est-ce que la propension qu’a James Donaldson de jouer avec une certaine esthétique de la cruauté a des limites ? Dans une interview donnée dans le podcast de l’ancienne gloire du basket Shaquille O'Neal, le youtubeur a mis ce dernier au défi de se faire piquer par 500 abeilles pour participer à l’une de ses vidéos. Brutal. Et stupide.

David-Julien Rahmil

David-Julien Rahmil

Squatteur de la rubrique Médias Mutants et Monde Créatif, j'explore les tréfonds du web et vous explique comment Internet nous rend toujours plus zinzin. Promis, demain, j'arrête Twitter.

Discutez en temps réel, anonymement et en privé, avec une autre personne inspirée par cet article.

Viens on en parle !
commentaires

Participer à la conversation

  1. Avatar Anonyme dit :

    En vrai, cet engouement n'est pas étonnant de la part des spectateurs. Notre ami c'était déjà essayé à l'exercice en créant un "faux" Squid Game il y 3 ans qui cumule près de 742M de vues à date. Tout le monde s'était vu participer à la suivante (qui n'a jamais eu la lieu avant les Beast Games).
    Sans compter sur le succès de la série éponyme ou encore the 8show pour n'en citer que deux.
    Je ne parle même pas de Yevgeny Pyatkovsky qui avait voulu recréer un vrai Hunger Games hyper hardcore en Siberie, si je ne dis pas de bêtises, cela avait annulé au dernier moment.

Laisser un commentaire