John Truby, l’un des meilleurs script doctors au monde, nous livre ses conseils pour créer LE storytelling qui frappe au cœur et engage puissamment.
#1 Bâtir une intrigue solide
Consultant auprès des auteurs et autrices dans la composition des scénarios qui feront les succès commerciaux de demain (dans la pub et le cinéma), John Truby sait mieux que quiconque que la victoire se remporte grâce à une intrigue bien ficelée.
« Depuis maintenant vingt ans que je travaille sur les techniques du storytelling, je constate que l’une des faiblesses majeures des auteurs provient d’une incapacité à bâtir une intrigue solide : l’intrigue tient en haleine, les personnages apportent des solutions. »
Selon lui, une histoire efficace se construit dans l’universalité d’un stratagème simple. Un ou plusieurs personnages sont confrontés à un dilemme, qui les force à franchir des obstacles, pour enfin retrouver un équilibre. En clair, ce sont les « étapes du récit » qu’on étudie au lycée.
#2 Ne pas lésiner sur l’émotion
Evidemment, John Truby le précise, mais la sensibilité et les affects ont une importance fondamentale. Pour obtenir l’attention, il faut aller chercher l’empathie des spectateur·rice·s, et pour cela, faciliter leur identification aux personnages.
« La source de l’engagement se trouve dans la capacité de l’auteur à créer un personnage auquel le spectateur s’identifie. Voir un personnage qui fait face à des dilemmes, qui est confronté à des obstacles et qui a un objectif clair, engage émotionnellement le spectateur. Je recommande donc aux auteurs de se poser systématiquement ces questions : à quels problèmes mon personnage fait-il face ? Quel·le·s sont ses buts, ses valeurs ? »
#3 Adapter l’écriture aux formats
L’évolution des technologies a permis à des formes nouvelles d’écriture d’émerger. À chacune correspond une forme particulière de narration. Pour John Truby, l’un des plus grands changements de ces dernières décennies nous vient de la télévision.
« La narration télévisuelle est vraiment devenue une forme d’art ces quinze dernières années. Elle autorise une structure narrative puissante puisqu’elle permet d’introduire des histoires parallèles dans une même séquence. Cette structure est inspirée des nouvelles du XIXe siècle. »
Et les dernières évolutions technologiques (jeux vidéo, réalité virtuelle, réalité augmentée, réalité mixte) produisent elles-aussi des changements structurels pour la trame narrative.
« Avec les jeux vidéo, on a la possibilité de produire encore plus de ramifications dans les histoires, mais la réelle rupture se trouve avec la réalité virtuelle qui permet de développer la narration à 360°. »
#4 Garder à l’esprit que la technologie ne se substitue pas au récit
Plus les formats et supports se multiplient, plus importante encore est la structure du récit.
« Le pouvoir de la réalité virtuelle ne se situe pas au niveau de la scène, il se situe au niveau de l’immersion. Mais pour maîtriser une narration à 360° qui inclut plusieurs histoires qui se déroulent en même temps, il faut appliquer une grammaire stricte. »
Pour le script doctor, la sophistication ne sert pas nécessairement la narration : appliquer une grammaire narrative simple et maîtrisée, bien connaître le genre dans lequel on s’inscrit, permet au contraire de stabiliser la structure.
« Les genres et les structures narratives maîtrisés suscitent bien plus l’engagement que le médium en lui-même qui est là pour ajouter une dimension d’expérience. »
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Propos recueillis par Nastasia Hadjadji, pour un article paru dans le hors-série "L'engagement" réalisé en partenariat avec Brainsonic.
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