Le SXSW, (South by Southwest) rassemble depuis vendredi innovateurs et disrupteurs de tous horizons. IA, voitures autonomes, bots, robotisation, biomimétisme et place de l’humain dans le monde du travail s’annoncent comme les principaux thèmes de cette édition 2017. Décryptage de Christel Engelvin, envoyée spéciale pour L’ADN.
Disrupter les disrupteurs
C’est LE défi lancé à la prochaine génération de startupers pour enrayer la machine à faire des « digital copycats », ou me too. comme le font aujourd’hui les réseaux sociaux : Snapchat inspire Instagram qui inspire lui-même Facebook. Depuis quelques années, en effet, le recours aux mêmes méthodologies et matrices stratégiques conduit à une convergence des modèles des startups dont les produits et services finissent par se ressembler étrangement.
Face à ce constat, Karwai Ng et Will Anderson (Design strategists @SapientNitro London) invitent, dans un discours de la méthode 3.0, les startupers à utiliser de nouveaux canevas stratégiques pour stopper le clonage et en finir avec les “Digital copycats”.
Pour défricher les territoires d’innovation de demain, le français Henri Jeantet (Founder @Unknows) et l’américain Mike Griffin (Director of user experience @Ricoh) proposent quant à eux, de repartir des usages en croisant big data et ethnologie pour sortir de la bulle d’enfermement métier/marché. AirBnB n’aurait pas pu être inventé à partir des data d’Hilton…
Penser le travail post-emploi
Concurrence des robots pour les cols bleus ou de l’intelligence artificielle pour les cols blancs, auto-entreprenariat, management de la neuro-diversité, rendre le monde du travail plus inclusif, gérer la coopération homme-robot… Au SXSW, le monde du travail est en proie à de nombreuses redéfinitions et de nombreuses interrogations.
L’explosion du nombre des travailleurs indépendants et auto entrepreneurs, entrainée par l’Uberisation et encouragée depuis la crise financière de 2008 par le mouvement massif d’externalisation des grandes entreprises, a entrainé l’émergence d’une nouvelle classe de travailleurs libres, autonomes et auto-régulés. Avec des solutions comme Square, une plateforme qui transforme n’importe quel smartphone en terminal de paiement par carte de crédit, chaque individu peut monétiser sa voiture, son appartement, ses savoir-faire… et ainsi conforter l’idée que nous sommes « tous entrepreneurs ».
Pourtant, aujourd’hui 1 travailleur indépendant sur 3 avoue rêver d’un emploi salarié. Couverture sociale, crédit, retraite, trésorerie… dans un monde où le salariat demeure un référentiel puissant pour l’organisation du quotidien, ce statut dessine des besoins nouveaux… et un nouveau champ d’opportunités pour les fintechs de demain.
L’OS, nouveau levier du POS
Social shopping, commerce ubiquitaire, paiement invisible… le commerce de demain est également un des axes de réflexion qui anime cette édition 2017.
Aux USA, 70% des patrons de petits et moyens commerces se disaient préoccupés par leur système d’information (étude Verifone, juillet 2016). Une maturité digitale frappante … Plus précisément, c’est en matière de fidélisation que la technologie semble le plus faire sens à leurs yeux, et notamment pour convertir les shoppers en clients fidèles.
En favorisant l’innovation de service, les pure-players instaurent de nouvelles normes d’usages (recherche produit guidée, paiement fluide, politique retour, etc.) et mettent sous pression le retail physique. Dans ce contexte, le nouveau défi pour les retailers est de faire du point de vente physique un point de contact aussi ouvert, agile et souple pour le shopper que les points de contacts digitaux.
Sur le versant de l’exploitation, les bénéfices sont nombreux pour le commerçant : contrôle des coûts, baisse des ruptures de stock, fidélisation, connaissance client… mais aussi une meilleure productivité des collaborateurs en point de vente, dont le métier se voit élargi et redéfini.
Le déploiement des nouvelles solutions de paiement (digital wallets) apparait comme l’occasion de penser plus large et d’accélérer la transformation du retail.
Intelligence Artificielle (IA) - Augmented Intelligence (AI) : le match
La grande star de l’édition 2017 du SXSW est incontestablement l’intelligence artificielle qui est ici sur toutes les lèvres, et traverse toutes les disciplines de l’éducation au secteur bancaire en passant par la médecine.
Elle semble tout d’abord prometteuse en matière d’interface et de relation client, notamment par sa capacité à embarquer une énorme quantité d’informations sur les produits, comme le souligne Chris Messina Fondateur @Stealth et inventeur du hashtag. Mais aussi, et paradoxalement, dans la qualité de l’interaction elle-même car « L’avantage du robot sur l’homme, c’est la patience…. Et en matière de relation client, c’est un asset » comme le dit avec malice Arnaud Auger, Senior Strategic Analyst@ l’Atelier BNP-Paribas North America.
En matière de santé, on constate un fort développement de l’I.A. par les healthtechs dans de nombreuses applications : diagnostic automatisé, lecture de résultats d’analyses, mais aussi, plus surprenant, dialogue avec le patient pour des soins psychologiques.
Michiel Raws, fondateur de la startup X2AI rapporte des premiers retours d’expérience très positifs de Tess, interface d’Intelligence Artificielle permettant un soutien psychologique par chat et messagerie instantanée accessible 24h/24. Une solution qui promet une démocratisation de l’accessibilité aux soins psychologiques, actuellement testée auprès de réfugiés Syriens.
Mais cet enthousiasme est pondéré par l’émergence de nombreuses questions éthiques qui se dessinent au fil des débats. Faut-il limiter la puissance de l’I.A. ? Eviter son omniprésence ? Délimiter des champs d’application ?
Mélanie Cook suggère pour sa part l’invention d’une Super I.A. qui surveillerait les IA. Oui, mais selon quelles règles éthiques ?
Mais la question qui cristallise les débats est sans aucun doute celle du risque d’une domination de l’homme par l’intelligence artificielle. Quand le recours à waze nous conduit à désapprendre à nous repérer dans notre propre ville, nous devenons cet « homme assisté » par la machine. Avec le risque, demain, d’une satellisation de la réflexion humaine, ou pire, d’une subordination ? On sait que le QI moyen en France aurait baissé de 8 points au cours des 10 dernières années.
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