
Sur Tiktok, la tendance des mini-retirements ou micro-retirements bat son plein. Le projet ? Profiter de la vie avant l'âge d'une hypothétique retraite.
Les congés sabbatiques font rêver les juniors. Désormais, ils n'attendent plus leurs congés payés pour se ressourcer, voyager, nourrir leur passion. Ils optent pour des mini-retraites (aussi appelées « micro-retraites » ou « années sabbatiques pour adultes » ), des pauses professionnelles de durée variable, parfois entrecoupées par la prise de jobs alimentaires.
Si le concept a été popularisé dès 2007 par Timothy Ferriss dans son essai La semaine de quatre heures, la pandémie de Covid-19 a ravivé ce besoin d’un meilleur équilibre entre vie professionnelle et personnelle. Contrairement à leurs aînés, les jeunes actifs ne se projettent plus dans une même entreprise sur le long terme et sont portés sur l'unbossing, le refus des responsabilités managériales, pour préserver leur temps libre.
Besoin de coupure
Anaïs et Antoine, deux millenials en CDI, ont tout quitté pour étancher leur soif de découvertes culturelles et s'affranchir d'un travail insatisfaisant. Ils documentent leurs aventures et leur quotidien de neets (Not in Education, Employment or Training) sur le compte Instagram @routed2a.
Antoine, 30 ans, avait acquis la situation professionnelle stable, confortable, élevée en modèle de réussite. Ingénieur en informatique dans la même boîte depuis trois ans, il gagnait bien sa vie, avait de bons rapports avec son supérieur, mais rêvait d'échappée belle. « J'ai toujours eu la bougeotte et je savais qu'un jour j'en aurai marre d'être assis derrière un bureau. Je n'avais pas l'impression d'être utile, je n'étais pas fier de moi en rentrant le soir. » Pendant la pandémie de Covid, le sentiment de perte de sens dans son travail grandit et il décide de se former à la photo avec son compte CPF. Il entrevoit alors la perspective d'une reconversion dans ce domaine.
Sa compagne Anaïs, 29 ans, partage son goût pour le voyage, mais est prise dans le rythme effréné d'un travail qui la passionne. L'occasion de faire une pause ne se présente pas. Mais au bout de quatre ans et demi de bons et loyaux services, un changement de direction dégrade son environnement professionnel. « C'était devenu invivable, un signe qu'il fallait passer à autre chose. » Ensemble, ils quittent leur emploi, l'appartement qu'ils louent, et partent à l'aventure, sans date de retour.
Chloé, 29 ans, développeuse web en entreprise, a également ressenti le besoin de faire une pause. « Mon copain et moi voulions faire l'expérience de la vie dans un autre pays. Depuis le lycée, le Canada m'attirait. J'ai découvert le PVT (Permis Vacances Travail) » qui permet aux moins de 30 ans (ou 35 ans selon les pays) de voyager et travailler dans un pays durant un an. Son entreprise refuse qu'elle télétravaille depuis le Canada, qu'à cela ne tienne, elle décide de démissionner en 2023. Grâce au réseau Workaway, elle passe trois mois et demi dans une ferme, nourrie et logée en échange de services rendus. Après cette bouffée d'air frais, Chloé reprend son travail en distanciel, comme elle le souhaitait.
Métro-boulot-tombeau : non merci !
Avec l'allongement du départ à la retraite, les jeunes doutent d'en bénéficier un jour. Antoine me le confirme : « À notre âge, on ne sait pas si on touchera une retraite décente, ni ce que l'avenir nous réserve. Je ne veux pas avoir de regrets. Je préfère avoir des difficultés à joindre les deux bouts plus tard, en ayant bien vécu, plutôt que d'atteindre la retraite sans avoir profité, en n'étant plus mobile. » Et les chiffres de l'Insee confortent son point de vue : en 2022, l'espérance de vie sans incapacité est de 63,8 ans pour les hommes et 65,3 ans pour les femmes, alors que l'âge légal de départ à la retraite est désormais de 64 ans.
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