Un personnage de manga sur un mur en brique

« New Cool Japan » : comment le PIB du Japon se chauffe à la culture manga

© Tim Mossholder

Soft power japonais : tous les indicateurs sont au vert !

La nouvelle en a ravi plus d’un. Dans une vidéo publiée sur X samedi 9 novembre, Inoxtag, le youtubeur aux quelque 8 millions d’abonnés, a annoncé la parution de son premier manga ce jeudi 21 novembre. Instinct, c’est l’histoire d’Haki, un garçon de 19 ans qui a le don de voir les intentions d’autrui. Un don qui, d’après la bande-annonce, le mènerait à sa perte. Le manga d’Inoxtag est déjà classé numéro 1 des ventes, devançant les livres de Jordan Bardella et de Philippe de Villiers. Il prouve une énième fois à quel point « la culture populaire du Japon est mondialisée », souligne Karoline Postel-Vinay, directrice de recherche à Sciences Po, spécialisée en relations internationales et Japon. « La BD japonaise fait partie du starter pack de chaque Français de moins de 50 ans aujourd’hui », indique de son côté Julien Bouvard, maître de conférences en études japonaises à l’université de Lyon 3, et spécialisé en histoire du manga.

La naissance du Cool Japan

Pour Julien Bouvard, Inoxtag représente la nouvelle génération, la première étant les téléspectateurs de Goldorak, une série télévisée animée japonaise datant des années 70. Il aura cependant fallu attendre plusieurs années avant que le gouvernement japonais ne s’intéresse à cette industrie créative qui fait un carton à l’étranger. Tout commence en 2009, quand le journaliste Douglas McGray publie un article intitulé Japan’s Gross National Cool, à traduire par Le PIB du cool au Japon. Le journaliste y invite le Japon à essayer de capitaliser sur son aura culturelle et la popularité de sa culture populaire à l’étranger, raconte le maître de conférences en études japonaises.

C’est alors que le Cool Japan voit le jour. « Il s’agit d’une politique du gouvernement japonais lancée dans les années 2010-12. L’idée étant de soutenir tout ce qui touche à l’industrie créative avec les mangas, les jeux vidéo, les animés, mais aussi la gastronomie ou encore les arts martiaux », indique Karoline Postel-Vinay. Une façon aussi pour le pays de faire de ses œuvres culturelles un outil idéal pour le soft power (diplomatie douce, en français). Le soft power étant défini comme un moyen d’influencer les comportements par des moyens non coercitifs, contrairement au hard power (qui se traduit, entre autres, par l’usage de moyens militaires).

Vers un New Cool Japan

L’affaire semble porter ses fruits puisqu’en juin, le gouvernement japonais a présenté sa stratégie New Cool Japan dans laquelle il annonce vouloir quadrupler, d'ici 2033, les résultats à l’étranger issus de ses produits culturels, comme le manga. Le pays des mangas espère ainsi atteindre les 118 milliards d’euros selon l’AFP. « Il y a peu de différence entre le Cool Japan et le New Cool Japan. Le Japon cherche aujourd’hui à mettre davantage l’accent sur le tourisme ici », précise Julien Bouvard. Il ajoute : « En 20 ans, le pays est passé de 3 à 30 millions de visiteurs par an. C’est une explosion très récente. » Les premiers visiteurs étant « les voisins coréens, chinois, vietnamiens, taïwanais et hongkongais », précise le chercheur.

Une façon pour le pays de redorer son image auprès des pays voisins en Asie du Sud-Est. Comme le dit Julien Bouvard : « Depuis la Seconde Guerre mondiale, le Japon a une mauvaise image. » Il est intéressant de voir que parfois, les effets du soft power sont en contradiction avec la géopolitique. « Officiellement, les relations Chine-Japon sont très mauvaises. Et pourtant, les premiers touristes au Japon sont les Chinois », conclut Karoline Postel-Vinay.

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