
En détournant le slogan féministe « my body, my choice », le commentateur d’extrême droite Nick Fuentes, 26 ans, illustre la vitalité des thèses masculinistes aux États-Unis.
Les votes n’étaient pas encore dépouillés que le commentateur politique d’extrême droite Nick Fuentes criait déjà victoire : « Les hommes gagnent encore. Et oui, nous contrôlons votre corps. Votre corps, notre choix. Pour toujours. » Sa vidéo publiée sur TikTok a été vue par 91 millions d’utilisateurs sur X. Des milliers de jeunes hommes ont repris la formule, suscitant autant de likes que de réactions outrées.
Viral également sur TikTok, le slogan « your body, my choice », « ton corps, mon choix » en français, soit un détournement du slogan féministe et pro avortement « mon corps, mon choix » , s’est retrouvé dans les commentaires des vidéos TikTok de milliers de jeunes Américaines.
Une guerre contre les femmes
« Cette idéologie de haine des femmes s’est développée dans le débat public américain depuis les années 90 et n’a pas attendu Donald Trump pour émerger, rappelle Claire Delahaye, professeure des universités en histoire et études américaines à l’Université Gustave Eiffel. Elle a eu des conséquences très concrètes aux États-Unis : des tueries de masse à l’encontre de femmes ont déjà été commises par des hommes. »
Dès le lendemain de la première élection du candidat républicain en 2016, The Institute for Strategic Dialogue relevait déjà une hausse de 4 600 % des commentaires misogynes en ligne. Beaucoup prônaient même l’abandon du 19e amendement, l’article de la Constitution qui octroie aux femmes le droit de vote. En 2024, la nébuleuse masculiniste s’est étendue sur les réseaux sociaux, avec des dizaines d’influenceurs et podcasteurs – tous jeunes et blancs –, qui ont développé leurs médias autour de l’idée qu’ils se font de la virilité.
Une « manosphère » entièrement acquise à la cause de Donald Trump qui, de son côté, ne s’est pas privé d’y faire la promotion de sa propre candidature à l’élection présidentielle. « La nouveauté, c’est la manière dont le parti républicain a tenté de rallier ces hommes à sa cause. Cela s’est traduit par une campagne très axée sur la masculinité hégémonique avec de nombreux propos haineux à l’égard des femmes », poursuit Claire Delahaye. Faire la tournée des masculinistes est devenu un moyen de capter les Américains de la GenZ, dont les offices de statistiques estiment qu’ils sont près de 41 millions aux États-Unis, dont 8 millions de primo votants. Un choix gagnant, si l’on en croit le résultat des élections : 54 % des hommes ont voté pour le candidat républicain.
Une haine en augmentation
Selon Claire Delahaye, le masculinisme n’est pas près de perdre du terrain : « Aujourd’hui, l’antiféminisme est l’un des moyens les plus efficaces pour recruter de jeunes électeurs, observe la chercheuse. Tant que de jeunes hommes seront désemparés pour des raisons liées à la crise économique, des personnalités comme Donald Trump pourront continuer d’expliquer que ce malaise est lié à la prise de pouvoir des femmes…, même si cette “prise de pouvoir” ne correspond à aucune réalité tangible. »
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