une jeune garçon au bonnet blanc devant un stade

Qui est BenderBij, le reporter de 16 ans qui a suivi les affrontements de hooligans israéliens à Amsterdam ?

À la manière du journaliste Rémy Buisine, ce jeune youtubeur habitué aux micros-trottoirs a apporté un contrepoint essentiel sur les violences jugées antisémites qui ont provoqué un emballement médiatique.

« Oh, oh, on est arrivé à Central Station, et on peut voir que l’ambiance est beaucoup moins plaisante (…) Il y a une grosse foule ici et ils volent des barres métalliques d’un chantier. » Avec son bonnet blanc, sa voix fluette et sa gestuelle de pro, Benjamin Julius Pearson Buit se trouve au bon endroit au bon moment. À tout juste 16 ans, ce reporter, suivi par 237 000 personnes sur YouTube et 420 000 sur TikTok, a capturé l'un des évènements les plus polémiques de cette fin d’année. Alors qu’il suivait les supporters à la sortie du match de Ligue Europa entre le club israélien Maccabi Tel-Aviv et le club néerlandais Ajax Amsterdam, BenderBij a filmé et commenté plusieurs épisodes de violence rapidement qualifiés de « chasse aux juifs », voire de « pogrom » par des personnalités politiques et médiatiques. Or, comme de nombreuses vidéos prises cette nuit-là et la journée qui a précédé, le reportage de BenderBij raconte une tout autre histoire.

Retour sur un emballement médiatique

Reprenons le déroulé de cet emballement médiatique. Le lendemain du 7 novembre, les médias relayent largement des vidéos montrant des violences commises envers ce que l’on devine être des supporters israéliens. Certains sont jetés dans les eaux glacées du canal, d’autres sont obligés de crier « Palestine libre » ou hurlent qu’ils « ne sont pas juifs » pour arrêter de se faire frapper. Comme l’indique Élodie Safaris dans un article retraçant les événements pour Arrêt sur Images, un narratif va s’imposer : celui des violences antisémites. Le président israélien Isaac Herzog va même jusqu’à utiliser le terme lourd de « pogrom » ; un terme qui sera ensuite repris par Julien Bahloul, ex-porte-parole de l’armée israélienne, par Julien Dray ou encore par les chroniqueurs de Touche Pas à Mon Poste. Le lendemain, certains médias comme le journal télévisé de TF1, France Info ou France Inter commencent à évoquer des violences commises par les supporters du Maccabi Tel-Aviv Football Club la veille et le soir du match. On évoque alors des chants haineux et racistes ainsi que des drapeaux israéliens étaient arrachés des fenêtres. Sur les réseaux, notamment sur X, des vidéos montrant les exactions des supporters israéliens commencent à circuler. Ces vidéos sont parfois ignorées ou reprises par les médias pour illustrer, à tort, les violences contre les supporters israéliens.

Au cœur de la mêlée

C’est dans ce contexte particulièrement tendu que la vidéo de BenderBij est publiée et vue plus de 1,3 million de fois en trois jours. Adeptes des micros-trottoirs et des interviews prises sur le vif, cette star locale suit régulièrement des manifestations et des évènements publics à Amsterdam. On le retrouve donc à la sortie du stade où il filme l’ambiance plutôt festive de fin de match. Après cette séquence, il se rend en centre-ville et capture une ambiance très différente. Il tombe sur un groupe d’une centaine de supporters ultra du Maccabi qu’il montre en train d’enfiler des cagoules et de s’armer de barres de fer trouvées sur un chantier. Rapidement, la situation dégénère et les hooligans s’en prennent à des passants dans la rue, puis à plusieurs voitures de police. On comprend, par la suite, que l’affrontement oppose ces supporters aux chauffeurs de taxi de la ville, pour beaucoup d’origine marocaine. Plus tard dans la séquence, on peut voir un groupe de hooligans qui, malgré le dispositif policier, lance des pierres contre un immeuble affichant un drapeau palestinien à la fenêtre. La vidéo se termine sur l’évacuation en bus des Israéliens alors que les chauffeurs de taxi klaxonnent à l’unisson.

Mis en avant par le compte X de Caisse de grève, le jeune reporter va être encensé sur les réseaux et présenté comme un contre-exemple aux médias mainstream accusés de relayer de la propagande. Son jeune âge ainsi que son style de reportage sans fioritures et proche de celui de Rémy Buisine apportent un contrepoint que beaucoup jugent salutaire. Même si sa vidéo ne montre finalement que très peu de choses, le fait qu’elle ait été utilisée (avec d’autres vidéos) par les médias du monde entier pour raconter une version des faits beaucoup plus complète lui confère immédiatement une aura de crédibilité. La publication de ces vidéos est-elle toutefois suffisante pour nuancer et préciser l’histoire relayée sur les plateaux de télévision depuis quatre jours ? Rien n’est moins sûr.

David-Julien Rahmil

David-Julien Rahmil

Squatteur de la rubrique Médias Mutants et Monde Créatif, j'explore les tréfonds du web et vous explique comment Internet nous rend toujours plus zinzin. Promis, demain, j'arrête Twitter.

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commentaires

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  1. Avatar Charles dit :

    Superbe travail d'investigation!
    Commentaire potentiellement lourd de conséquences..
    Laissons la Police mener son enquête...

  2. Avatar Anonyme dit :

    Bravo et merci d'apporter une lecture différente des ces évènements.
    Le rôle des médias est essentiel et vous faites un travail très honnête.

  3. Avatar Anonyme dit :

    Je commençais à croire que le journalisme était mort. Merci pour cet article.

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