Donald Trump et Kamala Harris sur leurs portables

Kamala, Donald, (Elon) et Internet : les influenceurs vont-ils faire basculer l’élection ?

© FB via Ideograme (Synthographie réalisée avec IA)

Alors que le camp républicain mise sur la puissance d'Elon Musk, le camp démocrate éclate sa campagne sur les réseaux en laissant les manettes à des jeunes influenceurs.

« Comme vous pouvez le voir, je ne suis pas seulement MAGA, je suis dark MAGA. » Le 6 octobre dernier, un Elon Musk sautillant (et instantanément mémifié) a mouillé sa chemise en participant pour la première fois à un meeting de Donald Trump. Le milliardaire qui s’est offert Twitter en 2022 semble avoir finalisé sa mue politique après avoir relayé la rhétorique et la désinformation du candidat républicain, mais aussi lancé une communauté d’action politique qui collecte (de manière plus ou moins illégale) des données d’internautes et diffuse de la publicité ciblée sur les réseaux.

Musk dévoile son jeu

L’utilisation de cette expression « Dark MAGA » n’est pas une simple blagounette réservée à la scène. Il s’agit d’un clin d’œil très appuyé à une nouvelle esthétique qui a émergé sur les réseaux d’extrême droite américaine. Les sympathisants et militants qui se revendiquaient il y a quelques années de l’alt-right (mouvement d’extrême droite apparu sur Internet) créent sur TikTok et Telegram des milliers d’images glorifiant une version autoritaire, violente et fascisante de l’Amérique de Trump. On y voit sa tour peinte en noir, des personnages aux yeux laser bleus brandir des armes et porter des brassards inspirés des nazis, tandis que le code couleur tourne autour du noir et du rouge. Autrement dit, Elon Musk fait clairement les yeux doux à la frange la plus radicalisée et la plus connectée des pro-Trump.

Shitposting décentralisé

Du côté des Démocrates, la stratégie de communication sur les réseaux se situe à l’opposé du spectre. Face au trou noir massif que représente Elon Musk, le parti de Kamala Harris a mis en place une task force élargie et décentralisée de créateurs de contenu qui inondent les réseaux de vidéos amusantes ou moqueuses vis-à-vis du camp adverse. Comme nous le raconte le Washington Post, cette équipe de 250 personnes a été mise en place lors du lancement de la campagne de Joe Biden afin de mémifier le président sortant auprès d’une audience jeune. Leur fonctionnement est totalement différent par rapport à la campagne d’Hillary Clinton, qui nécessitait 12 collaborateurs et 10 brouillons pour rédiger un tweet. Les vidéos sont produites et diffusées en moins d’une demi-heure, et la liberté de ton est totale, penchant vers un humour sarcastique ou des messages positifs.

Pour Bloomberg, la stratégie d’occupation du terrain numérique s’inspire carrément du shitposting, une technique largement utilisée par le camp MAGA, qui consiste à harceler constamment son adversaire à coups de mèmes et de montages moqueurs. Dernier exemple en date ? Quand CNN a rapporté que le candidat républicain au poste de gouverneur de Caroline du Nord, l'actuel lieutenant-gouverneur Mark Robinson, s'était qualifié de « nazi noir » et de « pervers » sur un site pornographique, l'équipe a rapidement publié plusieurs images intimes de Trump à ses côtés, soulignant le soutien de l'ancien président au candidat controversé.

@maga_tears_

Trump: Mark Robinson is Martin Luther King on steroids. He is better than Martin Luther King#foryou #trending #fyp #america #trend #today #donaldtrump #Trump

♬ original sound - MAGA TEARS

Une fois en ligne, ce contenu est massivement reposté par des influenceurs de niche qui n’ont parfois aucun rapport avec la politique. On a pu voir des créateurs de contenu comme Gabrielle Blair, une blogueuse de 50 ans à l’origine du compte Instagram @designmom, reposter des dépêches issues de la convention démocrate.

Et ça marche ?

Alors, laquelle de ces deux stratégies est la plus efficace ? Selon une analyse des données de Zelf, une société de mesure en ligne, la campagne de Harris a obtenu 100 millions de vues de plus que celle de Trump sur TikTok, alors qu'elle compte deux fois moins d'abonnés. Mais ces bons résultats ne garantissent en aucun cas une victoire à la présidentielle. Bloomberg rappelle le cas de la candidate démocrate au Sénat américain, Katie Porter, qui a fait une campagne victorieuse sur les réseaux, mais n’a pas réussi à mobiliser les jeunes le jour du vote. Sur les sites de paris en ligne, qui sont autant scrutés que les sondages officiels, les cotes des deux candidats sont au coude à coude – avec un léger avantage pour Harris.

David-Julien Rahmil

David-Julien Rahmil

Squatteur de la rubrique Médias Mutants et Monde Créatif, j'explore les tréfonds du web et vous explique comment Internet nous rend toujours plus zinzin. Promis, demain, j'arrête Twitter.

Discutez en temps réel, anonymement et en privé, avec une autre personne inspirée par cet article.

Viens on en parle !
Podacast : En immersion
commentaires

Participer à la conversation

Laisser un commentaire