
A l’heure de la génération #hashtag, les contenus et modèles économiques numériques natifs sont désormais incontournables pour les médias. Explications selon les résultats de l’étude Bain & Company.
Selon Bain, la Génération #hashtag – à savoir tout ceux qui, indépendamment de leur âge, privilégient le contenu qui a été conçu et distribué exclusivement par les canaux numériques, et surtout mobiles – regroupe à présent près de la moitié des consommateurs.
Contrairement aux idées reçues, une proportion grandissante de jeunes consommateurs est disposée à payer les contenus numériques, en dépit de leurs moyens financiers limités et de leur familiarité avec les alternatives illégales. La survie des médias et des entreprises culturelles dépendra de leur capacité à comprendre ces nouvelles habitudes de consommation et à adopter une attitude donnant la primauté au numérique natif, plutôt qu’à numériser les contenus et modèles économiques existants.
Dans son étude menée auprès de 7 000 consommateurs dans 10 pays, Bain a constaté que la consommation numérique native est presque aussi élevée dans les marchés émergents que dans les pays développés :
- Le secteur du divertissement (vidéo, musique et jeux) a franchi un point de basculement dans sa transition numérique avec 47 pourcent de consommateurs appartenant à la Génération #hashtag dans les marchés occidentaux (France, Allemagne, Suède, Royaume-Uni et Etats-Unis). Cette proportion est de 37 pourcent sur les marchés émergents (Russie, Afrique du Sud, Inde, Chine et Brésil), contre seulement 24 pourcent en 2014.
- Les journaux et les magazines en ligne ont atteint des taux de pénétration numériques importants respectivement de 89 et de 65 pourcent. Dans l'ensemble, 30 pourcent des lecteurs (presse et livre inclus) font aujourd’hui partie de la Génération #hashtag sur les marchés développés et émergents.
- Les médias de service, des petites annonces immobilières ou d’emploi, aux sites de voyage en passant par les guides de sortie, observent eux-aussi un passage rapide au numérique natif avec des services tels que LinkedIn, AirBnB et Yelp. Alors que la génération Y donne le ton en matière de divertissement, ces services numériques natifs bénéficient d’un engouement qui transcende les générations : plus de 30 pourcent des consommateurs de 35 ans et plus sont adeptes des services numériques natifs dans l’immobilier par exemple, comparés à 20 pourcent parmi les moins de 35 ans.
Les nouvelles plateformes - notamment mobiles - offrent un nouvel espoir sur l’existence d’une clientèle prête à dépenser. Les résultats indiquent que les consommateurs équipés de smartphones sont plus enclins à payer pour du contenu numérique natif : le taux de pénétration des modèles numériques payants pour la vidéo est de plus de 25 pourcent chez ceux qui possèdent un smartphone et de seulement la moitié chez ceux qui n’en possèdent pas. Ceci, poursuit Bain, peut partiellement expliquer pourquoi les plus jeunes générations, plus enclines à utiliser leur smartphone pour accéder aux contenus, semblent plus à l'aise avec les modèles payants.
Pourtant, en dépit de cette dynamique positive, un long chemin reste à parcourir pour revenir aux niveaux de monétisation moyens des modèles pré-numériques. Les plateformes numériques natives luttent farouchement pour conquérir un leadership mondial sur le marché des médias. Cependant, la taille ne fait pas tout. Certains champions de cette nouvelle génération comme YouTube et Spotify introduisent eux-mêmes des contenus et services premium en vue d’atteindre plus efficacement leur plein potentiel économique.
Maîtriser les nouvelles options de monétisation à l'ère du numérique natif exige que les acteurs du secteur des médias développent de nouvelles compétences et se concentrent sur cinq impératifs stratégiques:
Repenser la stratégie éditoriale : Les sociétés de médias doivent créer du contenu pour le monde dans lequel nous vivons, plutôt que d’adapter les anciens formats aux nouveaux écrans. S’ils ne sont que rarement générés par les utilisateurs, les contenus gagnants sont parfois co-créés et souvent co-distribués avec les audiences.
Assurer l’accès à la distribution : Dans un espace numérique de plus en plus surpeuplé, l'ancien paradigme selon lequel « le contenu de qualité se vendra toujours » n’est plus aussi vrai. Sécuriser les canaux de distribution pour s’assurer que le contenu de qualité atteigne ses consommateurs est d'autant plus essentiel que les publics sont de plus en plus fragmentés entre divers médias et plateformes.
Adopter la nouvelle donne publicitaire : Alors que les grands annonceurs adoptent le numérique non seulement pour le marketing direct mais aussi pour leurs campagnes de marque, les nouveaux formats bouleversent les règles du marché de la publicité dans son ensemble. Ciblage individuel, mesure du retour sur investissement et présence sur les réseaux sociaux ont rejoint, et parfois remplacé, les notions de puissance et d’affinité dans le manuel du parfait annonceur.
Mériter les données d’usage : Dans une économie de la demande, anticiper les tendances de fond chez les consommateurs est plus essentiel que jamais. Mais aujourd’hui, les médias doivent gagner la confiance des consommateurs et concevoir les incitations et contreparties pertinentes afin que les clients fournissent leurs données volontairement.
Aborder les partenariats et acquisitions différemment : L'histoire des mutations numériques est jonchée d'exemples d'acquisitions qui ont échoué. Pourtant, le passage au numérique natif exige de s’approprier de nouvelles compétences absentes des acteurs traditionnels. Gagner en agilité dans l'acquisition et l'intégration des médias numériques natifs devient une compétence primordiale pour les entreprises qui veulent faire partie de la prochaine vague de transformation numérique.
(Crédit photo : Maria Elena)
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