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Témoignages : « Pourquoi j’ai quitté Facebook »

Alors que Facebook se retrouve une nouvelle fois dans la tourmente et que les #DeleteFacebook pleuvent sur Twitter, nous avons demandé à des early desadopters pourquoi ils ont supprimé leur profil sur le réseau social.

Cambridge Analytica, plus gros scandale internet de tous les temps, sonnera t-il le glas de Facebook ? On se savait hypnotisé·e·s par le scroll, enfermé·e·s dans des algorithmes réducteurs, monitoré·e·s par les marques… Mais manipulé·e·s pour orienter nos votes lors d’une élection présidentielle ? Non. Et la pilule passe mal. Ces révélations pourraient provoquer des départs du réseau social. Pour certains et certaines, la décision de partir remonte déjà à quelques mois. Pourquoi ont-ils/elles décidé de quitter le réseau ? Et surtout, comment le vivent-ils/elles au quotidien ? Visiblement, cela n'est pas aussi facile qu'ils l'espéraient...

Balthazar, 18 ans : « Facebook est devenu trop addictif et bas de plafond »

« J’ai arrêté Facebook il y a 4-5 mois maintenant. C’était devenu addictif et ça me prenait beaucoup trop de temps, plusieurs heures par jour. J’y allais surtout pour les informations, mais je voyais aussi des choses vraiment bas de plafond et un jour je me suis dit « Stop » . J’ai supprimé l’app de mon tél, et j’ai dû y retourner 2-3 fois depuis » .

Comme de plus en plus de jeunes de sa génération, Balthazar délaisse ce réseau vieillissant (et pris d’assaut par les parents), pour Instagram, Snapchat et Youtube. « J’utilise Snap pour des discussions de groupe, et Insta quand je m’ennuie. Ça tient l’attention pendant 5-10min contrairement à Facebook où ça peut durer des heures. Je trouve ça moins addictif. Perso, je suis plus Youtube comme réseau social » .

Dans son entourage, les profils sont encore très divers. Certain·e·s sont véritablement accros « même pendant les cours ou les pauses on les voit sur leur tél, c’est assez triste je trouve » , d’autres plus modéré·e·s qui touchent à tout sans addiction réelle, et quelques un·e·s « s’en foutent » .

« Facebook étant très implanté, il y a encore peu de déconnexions, mais je connais certains amis qui ont fait la même chose que moi » .

Pour se protéger sans se priver des aspects pratiques du réseau, Balthazar a tout de même conservé Messenger, pour communiquer avec ses ami·e·s, sa copine et sa classe. Preuve que la praticité «sans le lavage de cerveau, c’est aussi possible".

Nastasia, 28 ans : « Dans Facebook il y a une forme d’injonction sociale »

« C’était en rentrant d’un festival de 3 jours, sans accès à Facebook, que j’ai pris une décision radicale » . Fin mai 2017, Nastasia, 27 ans à l’époque, coupe tous les ponts avec le réseau. « Facebook était uniquement devenu pour moi un terrain propice aux micro interactions chronophages et vides de sens. En rentrant de festival, j’ai eu ce poids sur les épaules de devoir répondre aux dizaines de messages que j’avais reçu entre temps » .

Avec plus de 1000 contacts sur Facebook, Nastasia perd une heure chaque soir en rentrant chez elle à entretenir des conversations "artificielles". Commençant à se politiser sur la question et  influencée par les hackers qu’elle fréquente, elle finit par juger la situation absurde. « Je ressentais une sorte de contrainte, d’obligation de maintenir mon quotient social » .

D’ailleurs, dans son entourage, certain·e·s ont mal vécu la « rupture » : « Je faisais partie d’une orga de festivals, et toutes les interactions entre les membres se faisaient sur Facebook. Quand j’ai décidé de quitter le réseau, certains ont pensé que je quittais aussi le navire. J’ai mis du temps à leur faire comprendre ma démarche » .

Changer ses habitudes ne suffit pas pour faire changer celles des autres. En intégrant un nouveau poste en avril 2017, Nastasia a aussi été confrontée à l’usage de Facebook en entreprise, entre collègues. « Tout le monde était sur Facebook et communiquait via des groupes ou sur Messenger » . Obligée de se plier aux « règles de l’entreprise », Nastasia crée alors un compte pro. « Je ne voulais pas que mes collègues voient ma vie privée » . Depuis, elle s’évertue à utiliser Facebook uniquement de cette façon, allant jusqu’à supprimer de ses contacts celles et ceux qui quittent l’entreprise.

« A l’injonction sociale des réseaux, je préfère le café entre vrai·e·s ami·e·s ! » .

Chloé, 22 ans : « Je n’ai jamais utilisé Facebook »

« J’ai connu les tous débuts de Facebook au collège, mais je n’ai pas suivi le mouvement car j’avais quelques aprioris » . Bizarre, inutile, potentiellement dangereux… Chloé se méfie du réseau. « Très rapidement Facebook a pris une ampleur que je n’aurais pas soupçonnée et je me suis rapidement sentie déconnectée du monde, quand bien même Facebook n’est que virtualité » . Mais ça ne la fait pas changer d’avis, et de déconnectée, Chloé devient vite précurseuse.

« Aujourd’hui lorsque que je dis que je n’ai pas Facebook je suis souvent cataloguée comme anticonformiste, mais en réalité je n'en vois juste pas l'utilité pour le moment. »

Certes « Facebook est un excellent outil de communication permettant à tou·te·s de pouvoir s’exprimer librement tout en bénéficiant d’une certaine visibilité » , mais Chloé reste très dubitative quant à l’usage des données collectées par ce « mastodonte des réseaux sociaux » .

Julie, 26 ans : « Le culte de raconter sa life sur Facebook, c’est fini »

« Il ne se passe plus rien sur les murs, on entretient des micro interactions, on nourrit son temps de façon passive en ingurgitant la vie des autres, l’auto-promo devient pénible… » . Pour Julie, Facebook était déjà mort avant qu’on ait l’idée d’en partir. A 21 ans, elle décide qu’elle a fait le tour de ce qui pouvait être amusant, et surtout, se rend compte qu’elle perd son temps à regarder défiler la vie des autres au lieu de vivre la sienne. « Ça crée une vraie frustration. Ça nourrit ta vie d’actions qui ne t’appartiennent pas. Ces aventures ne sont pas les tiennes, t’es juste resté sur ton canapé ou coincé dans le métro… » .

En prenant conscience de la réalité des choses, de plus en plus d’aspects de Facebook la dérange et la dégoûte. « Cette façon constante de se prendre en photo « pour Facebook », sans vraiment vivre ses propres expériences… Et puis avant le scroll c’était quand on s’ennuyait, aujourd’hui, tu te réveilles, tu scrolles. »

Julie supprime alors son compte et s’aperçoit au passage que certaines de ses relations étaient uniquement nourrit par le réseau. Le tri est salvateur, mais quelques années plus tard… sa vie professionnelle ne lui laisse plus le choix.

A 24 ans, elle y retourne, pour animer une page. « Au fur et à mesure, en découvrant mon retour, mes amis m’ont ajoutée. Mais je ne vais pas sur leurs profils, souvent vides. … A la rigueur j’écoute Arte Radio, et je tag quelques personnes sous des vidéos marrantes, mais je limite. »

Aujourd’hui, quand on lui demande si elle pourrait de nouveau quitter Facebook, Julie réfléchie avant de répondre cash « Je pourrais m’en passer, mais ça me ferait ch*er » . Ce qui lui manquerait le plus, ce serait Messenger. « J’ai tellement mis du temps à accepter d’utiliser de nouveau cet outil, que de passer sur un autre me coûterait. Et puis WhatsApp par exemple réclame les numéros de téléphone. Je trouve ça trop intime, moins pratique » .

Partir pour mieux revenir ?

Même chez les early desadopters, la fin de Facebook n’est donc pas une fatalité. Pour Vincent, community manager, il semble en effet difficile de se désengager complètement du réseau. « Le mouvement #DeleteFacebook me fait un peu penser au fait que tout le monde aime Arte mais que presque personne ne regarde vraiment la chaîne. Les personnes qui vont partir de Facebook vont vite y revenir et de leur plein gré » .

Ne pas vexer ses ami·e·s, entretenir des contacts professionnels fluides, suivre des médias uniquement présents sur le réseau… Quitter Facebook n'est pas anodin.

« Après, j'ai l'impression que Mark Zuckerberg ne consomme pas Facebook de la même manière que le commun des mortels, dans le sens où il a réduit la visibilité des publications de pages au profit des publications d'amis alors que la majorité des personnes présentes sur Facebook aujourd'hui sont là pour se tenir au courant de l'actualité, pour rire et partager des publications issues de pages » , commente Vincent.

L’avenir du réseau dépendrait donc des futures évolutions (voire revirements au vu des circonstances) orchestrées par la direction de Facebook. En attendant, le #DeleteFacebook continue d’enflammer...Twitter !

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commentaires

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  1. Avatar Céline dit :

    Bonjour L'ADN,
    pourquoi utiliser l'écriture inclusive ? Est-ce pour défendre l'égalité hommes / femmes ou défendre la condition de la femme ? Car l'écriture inclusive gâche la forme de votre article, et donc le fond... Nous devons relire 2 fois les phrases pour en comprendre le sens...
    Si c'est dans un but féministe, je vous suggère plutôt des articles de fond sur l'image du corps de la femme dans les médias, sur comment éduquer les jeunes garçons dans un respect de la femme, des mères et des sœurs ou encore quel accès à la contraception : confronter les mœurs et la réalité de l'accès. Ou bien encore quel est la réalité d'un avortement en France : quel parcours du combattant ?
    En espérant vous lire rapidement,
    Céline

  2. Avatar Aude dit :

    Le plus compliqué pour retirer ses informations personnelles, c'est de tout supprimer dans son historique, et là nous découvrons aussi bien nos posts, likes, commentaires, et même identification depuis la création du compte. J'ai utilisé le plugin "Social Book Post Manager" sur mon navigateur Chrome afin d'automatiser la suppression des posts, commentaires et like.
    En revanche pour supprimer les identifications ... il faut y aller manuellement et la dévalider une par une. J'ai mis 1 bonne journée pour nettoyer l'ensemble de mes données sur 10 ans.
    Bon courage !

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