
Vendue comme une nouvelle manière de créer du code assisté par IA, cette méthode est en train d’enflammer le monde des startups.
« Il existe un nouveau type de codage que j'appelle le vibe coding, où l'on se laisse aller aux vibrations, où l'on adopte les exponentielles et où l'on oublie même l'existence du code. » Dans un post publié sur X le 3 février dernier, le cofondateur d’OpenAI Andrej Karpathy a donné un nom officiel à une pratique qui est en train d’exploser dans la Silicon Valley.

« Ce n'est pas vraiment du codage..., et ça marche en grande partie »
Derrière cette dénomination se cache en fait une nouvelle manière de « coder » des applications ou des jeux vidéo, qui consiste principalement à demander à un LLM de générer des lignes de code selon ses besoins. « Ce n'est pas vraiment du codage – je vois juste des choses, je dis des choses, j'exécute des choses et je copie-colle des choses, et ça marche en grande partie », poursuit celui qui a également dirigé la branche IA de Tesla pendant cinq ans.
De l’aveu même de Karpathy, la pratique manque clairement de précision et permet surtout de mener à bien des « projets du dimanche » faits pour s’amuser. Même si les modèles de langage se sont améliorés sur la génération de code, ils produisent encore beaucoup de bugs qui nécessitent que le prompteur teste et corrige constamment les erreurs plutôt que d’écrire quelque chose de propre.
« Je code comme une tempête »
Qu’à cela ne tienne, les médias se sont déjà emparés du phénomène pour le présenter comme l’avenir du développement. Dans un article du New York Times, le journaliste Kevin Roose explique ainsi qu’il « code comme une tempête » sans jamais avoir appris un seul langage informatique. Ce dernier indique avoir créé « un outil qui transcrit et résume de longs podcasts, un outil pour organiser mes signets de médias sociaux dans une base de données consultable, un site Web qui me dit si un meuble rentrera dans le coffre de ma voiture et une application appelée LunchBox Buddy, qui analyse le contenu de mon réfrigérateur et m'aide à décider quoi emporter pour le déjeuner scolaire de mon fils. »
En mars, un petit simulateur de vol très basique intitulé fly.pieter.com fait parler de lui. Créé par Pieter Levels, le gourou des solopreneurs boostés à l’IA, ce jeu accessible depuis le navigateur aurait été codé entièrement avec des LLM en une trentaine de minutes. Mieux encore, les petits affichages publicitaires qu’il embarque rapporteraient dans les 50 000 dollars à son créateur/influenceur. De quoi lancer définitivement le mythe du vibe coding.
Pour se rendre compte de la popularité du vibe coding, il suffit de visiter la page rosebud.ai qui permet de bricoler et de publier son jeu généré par IA et qui présente déjà plusieurs centaines de titres, plus ou moins réussis. Plusieurs plateformes permettant aux internautes de « coder » leur propre application sont aussi disponibles comme tempo.new ou Lovable.dev. La plupart sont payantes via un abonnement mensuel.
Avenir ou esbroufe ?
L’arrivée du vibe coding ne se fait d’ailleurs pas sans quiproquo. Les habituels enthousiastes de l’IA y voient l’avenir du développement Web et mettent en avant les progrès à venir de cette technologie. Sur TechCrunch, Jared Friedman, associé directeur de Y Combinator, l'un des accélérateurs les plus influents de la Silicon Valley, a révélé qu’un quart des startups accompagnées depuis janvier 2025 ont 95 % de leur base de code générée par l'IA – un chiffre qui, précise-t-il, ne concerne pas uniquement des fondateurs novices, mais bien des développeurs hautement qualifiés capables de tout coder eux-mêmes.
Toutefois, pour des développeurs chevronnés, l’idée selon laquelle le vibe coding est la réponse ultime à tout est jugée peu crédible. Sur Reddit, beaucoup n’y voient qu’une méthode imprécise, survendue à des non-codeurs. « J'utilise Cursor (un outil de coding augmenté à l’IA) au travail et c'est génial, mais seulement parce que je sais déjà coder. L'IA sera un formidable atout pour ceux qui savent lire et concevoir des systèmes de code », explique un redditeur qui raconte comment les néophytes génèrent plus de bugs que de codes utiles avec ces outils.
D’autres estiment que le concept même des LLM, à savoir un générateur de texte (ou de code) basé sur des probabilités, est incapable de créer de nouvelles choses – « peu importe le marketing que Sam Altman y met » – et pensent qu’il vaut mieux les considérer comme des outils « d’autocomplétion sous stéroïdes ». À la fin des fins, on en revient à la définition même de Karpathy, qui expliquait que le vibe coding est avant tout une nouvelle façon de tester des idées pour s’amuser.
Attention à ne pas sous-estimer le changement de paradigme qu'un outil comme Cursor amène dans les mains d'un développeur expérimenté.
C'est bien plus qu'une autocompletion sous stéroïdes. Croire qu'il ne s'agit que d'un buzz pour les applications du dimanche, c'est rester aveugle à une véritable révolution du métier.
J'en parle ici : http://alexissukrieh.com/blog/la-revolution-du-vibe-coding/