Une jeune femme dans la rue avec des lignes digitales sur le visage

Reconnaissance faciale : souriez, vous ne pouvez plus vous cacher

Des lunettes connectées pour identifier n’importe qui dans la rue ? C’est possible avec PimEyes.

Et si la nouvelle tendance 2025 était de sortir cagoulé ? Il y a quelques mois, AnhPhu Nguyen et Caine Arday Fio, deux étudiants de l'université américaine Harvard, ont réussi un tour de passe-passe technologique troublant : transformer les fameuses lunettes connectées de Meta – un gadget jusqu’ici plutôt dispensable – en véritable outil de reconnaissance faciale. Avec une paire de Wayfarer sur le nez, vous voici capable d’identifier automatiquement n’importe qui, pourvu que son visage soit identifiable. Le doxing – la divulgation de données personnelles – n’a jamais été aussi simple d’accès.

L'anonymat, c'est fini ?

Baptisé I-Xray et sorti fin 2024, le projet des deux étudiants a rapidement fait le tour d’Internet. C’est que la vidéo montrant l’efficacité du dispositif a de quoi déconcerter : on y voit son utilisateur interpeller plusieurs personnes dans le métro après avoir identifié leur nom, leur profession, voire même leur adresse, simplement en les regardant. Une performance qui serait basée sur l'agrégation de plusieurs technologies, dont celle des LLM (large langage models) et de PimEyes, un moteur de recherche spécialisé dans la reconnaissance faciale. Depuis son lancement en 2017 par les ingénieurs polonais Lucasz Kowalczyk et Denis Tatina, celui-ci inquiète presque autant qu’il fascine.

En téléchargeant la photo d’un individu sur PimEyes, l’outil va en quelques secondes identifier des images sur Internet sur lequel celui-ci apparaît. Si l’outil en question n’est pas à l’abri d’erreurs, le résultat est souvent déconcertant. Vous aviez été pris en photo il y a dix ans en boîte de nuit alors que vous n’aviez ni barbe ni calvitie ? Vous participez à une manifestation, portant des lunettes de soleil, alors qu’un photographe immortalise la scène ? Si l’image a été stockée sur un site accessible publiquement, PimEyes est potentiellement capable de vous retrouver.

Comment cela pourrait mal tourner...

Fin 2023, PimEyes avait d’ailleurs permis au journaliste du site d’investigation Bellingcat, Michael Colborne, de réaliser une prouesse : retrouver en quelques clics la trace de Daniela Klette, membre présumée du groupe terroriste d’extrême gauche et recherchée depuis une trentaine d’années.

En théorie, PimEyes est censé permettre de reprendre le contrôle sur son identité virtuelle. Vous pensez être victime de revenge porn ou d’un vol d’identité ? Vous n’avez qu’à utiliser le moteur de recherche pour scanner Internet. Enfin ça, c’est ce que dit l’entreprise, les résultats n’étant accessibles dans leur totalité qu’en payant une vingtaine d’euros. Comptez plus de 300€ par mois pour un accès illimité.

Du coup, vous reprendrez bien un peu de réglementations ?

Évidemment les abus sont nombreux, et le développement de tels outils de reconnaissance faciale pose d’insondables problèmes de respect de la vie privée. C’est d’ailleurs pour cela que AnhPhu Nguyen et Caine Ardayfio refusent de dévoiler au public le code qui permet de faire fonctionner leurs fameuses lunettes. À l’inverse, les deux étudiants veulent se servir de leur coup de maître pour sensibiliser le public. « Peu de gens réalisent qu’avec un simple nom on peut souvent trouver une adresse, un numéro de téléphone et des informations sur ses proches », expliquent-ils dans le document relatif à leur projet.

L’inquiétude que pose le développement d'outils comme PimEyes s’est même immiscée dans des discussions au sein de l’Union européenne. La bonne nouvelle ? L'UE a récemment adopté l'AI Act, une législation visant à mieux encadrer l'utilisation de l'intelligence artificielle sur le sol européen. L'article 5 interdit certaines pratiques dont « l'utilisation de systèmes qui créent ou nourrissent des bases de données de reconnaissance faciale grâce à la collecte non ciblée d'images faciales sur Internet ou à partir de vidéosurveillance. » Reste à voir comment cela sera mis en place techniquement sur le sol européen.

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commentaires

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  1. Avatar A. Georges dit :

    On va voter une loi et le problème sera réglé, comme d'habitude. Y a pas à dire, on est plus malins qu'eux ! Aïe, aïe, aïe.

  2. Avatar samailloute dit :

    Avec 9 milliards d'individus susceptibles de commettre des attentats, une reconnaissance faciale est le seul moyen de les prévenir.
    Il semble que la Chine l'ait bien compris. Il est plus confortable de vivre dans une dictature Chinoise que dans une démocratie Européenne, lorsqu'on n'est pas délinquant.
    Depuis l'abolition de la peine de mort, l'Europe et la France ne cesse de légiférer pour protéger les droits des criminels.

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