
Pour arriver à ses fins, le milliardaire fait appel à Andrea Stroppa, un geek italien qui fait la liaison avec Giorgia Meloni.
Alors que l’Europe est encore sous le choc du changement de stratégie des États-Unis et de leur rapprochement avec la Russie de Poutine, l’Italie de Giorgia Meloni est à deux doigts de faire un gigantesque cadeau à Elon Musk. Pour comprendre la situation, revenons un peu en arrière. Le 6 mars, le Parlement italien adopte un projet de loi intitulé « Space Bill » , qui vise à créer une réserve nationale de capacité de transmission par satellite, exclusivement gérée par des entités de l'Union européenne ou de l'Alliance atlantique. Dans les coulisses de ce projet de loi, deux grandes entreprises s'affrontent : d'un côté, l’opérateur de satellites français Eutelsat, et de l'autre, l'entreprise Starlink de notre bon vieux Elon Musk.
Meloni + Musk = émoji cœur
La possibilité de confier les systèmes de communication militaire italiens à un opérateur américain dans un contexte aussi tendu a forcément suscité des oppositions. Giorgia Meloni a notamment été accusée de vouloir offrir à Musk « le monopole de son espace sur un plateau d'argent ». Pour contrer cette éventualité, le Parti démocrate avait proposé deux amendements priorisant les entreprises européennes et garantissant une participation publique. Cependant, ces derniers ont été rejetés, laissant ainsi la porte ouverte à cette collaboration.
Dans les heures suivant le vote, les nouvelles contradictoires se sont enchaînées. Eva Berneke, la PDG d’Eutelsat, a déclaré dans un entretien accordé à Bloomberg TV : « Nous sommes en très bonne discussion avec l’Italie et espérons que cela continuera. ».Peu de temps après, un porte-parole du cabinet de la Première ministre italienne a affirmé qu'il n’y avait « pas de discussions en cours avec Eutelsat ou toute autre entreprise du secteur ». Cette déclaration contredit les propos de Giorgia Meloni, qui avait soutenu un possible accord avec Starlink en janvier dernier, évoquant notamment des discussions à un « stade préliminaire » avec SpaceX.
Si les choses restent pour le moment floues, il est difficile de ne pas remarquer cette discrète lune de miel entre la Première ministre d'extrême droite et le milliardaire qui dirige le DOGE. En septembre, c'est Musk lui-même qui lui remettait en main propre le Global Citizen Award, un prix décerné chaque année par le think tank américain Atlantic Council.
En janvier, la même femme politique prenait la défense d'Elon Musk et de son « génie ». Alors que ce dernier avait publiquement attaqué le chancelier allemand Olaf Scholz et le Premier ministre britannique Keir Starmer, Giorgia Meloni avait alors utilisé le contre-exemple de George Soros, un autre milliardaire critiqué pour son soutien financier à des initiatives libérales. « Mais, à ce que je sache, Elon Musk ne finance pas de partis, d'associations ou de politiciens à travers le monde », avait-elle déclaré. « C'est ce que fait, par exemple, George Soros. Et oui, je considère cela comme une dangereuse interférence dans les affaires des États et leur souveraineté. »
Le geek qui tient la chandelle
Mais dans cette affaire de satellites, une autre personnalité est intervenue pour défendre la vision de Musk : Andrea Stroppa. Cet informaticien italien, né à Rome dans les années 1990, s'est d’abord fait connaître dans le milieu du hacking en étant proche du collectif Anonymous. Après avoir mené une enquête sur les campagnes de désinformation en ligne de partis politiques italiens, notamment la Ligue et le Mouvement 5 étoiles, il est sélectionné en 2022 comme chercheur indépendant pour l’équipe de sécurité de Twitter (devenu X) après son rachat par Elon Musk. Chargé de lutter contre la diffusion de pornographie infantile sur la plateforme, il gagne la confiance du milliardaire, qui le remercie publiquement.
Depuis, Stroppa est devenu un interlocuteur privilégié de Musk en Italie, jouant un rôle clé dans les relations entre SpaceX et le gouvernement italien. D'après Wired, l'informaticien, suivi par plus de 120 000 personnes sur X, a servi d'intermédiaire pour l'invitation de Musk à Atreju, la convention annuelle du parti de Meloni, Fratelli d'Italia, en décembre 2023. C'est lors de cet événement qu'a été envisagé l’usage de Starlink dans les systèmes nationaux de télécommunications, notamment dans les zones les plus reculées du pays.
Invité au Wired Next Fest de Milan en 2024, Stroppa a justement utilisé l'argument du retard technologique de l'Italie pour inciter le pays – ainsi que l'ensemble du continent – à s'appuyer sur son patron. « Nous avons donné les clés à la France, puis ses technologies ont échoué et nous sommes restés 10 ans en retard. Aujourd'hui, la seule façon pour l'UE de faire de la recherche dans ce domaine est de s'appuyer sur un acteur privé ».
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