
Le suivi conso a le vent en poupe ! Motivés par des raisons économiques et environnementales, les Français sont de plus en plus nombreux à suivre leur consommation d'électricité grâce à des applis comme EDF&Moi. Celle-ci permet aussi de piloter sa consommation. Une autre révolution des usages.
Surveiller les jours où l'on utilise le plus d'électricité, comparer sa consommation avec celle des foyers équivalents… Ces réflexes se sont rapidement répandus au sein des foyers français, à la faveur d'applications de suivi de plus en plus efficaces. Avec l'électrification de nos usages, le pilotage de la consommation apparaît comme un nouveau levier décisif. Décryptage avec Benoît Lamberti, directeur Marketing & Expérience Client B2C chez EDF.
Le temps où l'on suivait sa consommation d'électricité via notre facture mensuelle semble révolu. Confirmez-vous que les Français sont devenus beaucoup plus attentifs à celle-ci ?
Benoît Lamberti : En tout cas, c’est ce que l'on observe chez les clients d’EDF qui représentent près de 7 consommateurs particuliers sur 10. Ces dernières années, nous avons vu le nombre d'utilisateurs de l'application EDF & Moi augmenter de manière significative. Dans le même temps, ils sont de plus en plus nombreux à consulter les outils de suivi de leur consommation. Pour vous donner une idée, le nombre d'utilisateurs actifs a doublé tandis que la consultation de ces fonctionnalités a triplé en 5 ans. Nous avons eu près de 250 millions de consultations pour la seule année 2024, c’est considérable.
Qu'est-ce qui a permis cette évolution ? La conjonction de la hausse du prix de l'électricité, des invitations à la sobriété et du développement des applications comme EDF&Moi ?
B.L. : Bien sûr, il y a eu des événements de crise énergétique et d'évolution à la hausse des prix de l'électricité. Mais plus globalement, il y a surtout eu un pincement particulièrement fort sur le pouvoir d'achat dans un contexte très inflationniste. Évidemment, nous n'avons pas fait exception à la règle. La facture énergétique est passée au crible et nos consommateurs souhaitent la réduire au maximum sans rogner sur leur confort. Il est donc bien naturel qu'ils fassent appel à ces fonctionnalités de suivi de leur consommation pour mieux la comprendre et agir pour la réduire.
« 1 client sur 4 suit très régulièrement sa consommation d'électricité. »
A-t-on une idée du nombre de Français qui suivent quotidiennement leur consommation d'électricité ?
B.L. : Nous savons que 1 client sur 4 la suit très régulièrement, plutôt de manière hebdomadaire. Après, cela dépend beaucoup des configurations dans lesquelles sont nos clients. Ceux qui ont un chauffage individuel électrique ont tout intérêt à beaucoup regarder et à piloter leur consommation pendant l'hiver. Ceux qui ont un véhicule électrique ont plutôt intérêt à bien l'organiser tout au long de l'année. On observe surtout que de plus en plus de consommateurs ont à cœur de s'organiser pour consommer mieux. C'est un point important : si on regarde de plus en plus son suivi conso, c'est parce qu'on comprend aussi que consommer mieux, c'est consommer moins cher. Contrairement à d’autres énergies, l'électricité a ceci de particulier que son prix peut varier au cours de la journée. Il peut donc y avoir un enjeu à consommer à certains moments plutôt qu’à d’autres, et planifier sa consommation est essentiel.
Est-ce que ce suivi et toutes les possibilités offertes comme la comparaison avec un foyer similaire ou la répartition annuelle de sa consommation permettent finalement à chacun de redonner de la valeur concrète à l'électricité, cette énergie vitale qu'on ne voit pas mais qu'on utilise en permanence ?
B.L. : Oui, effectivement ces fonctionnalités sont de plus en plus utilisées par nos clients, maisje pense que nous n'en sommes qu'au début de l'aventure de la maîtrise et du pilotage de nos consommations. Plus le suivi sera fin, régulier, à la maille journalière, voire heure par heure, plus le pouvoir d’action des consommateurs sera décuplé. Pour faire une analogie avec l'automobile, c'est parce que l'on voit la vitesse à laquelle on roule en temps réel qu'on est capable de l'ajuster. Mais si je vous dis à la fin du trajet à quelle vitesse moyenne vous avez roulé, c'est forcément moins efficace pour pouvoir adapter sa consommation. Si on veut vraiment rentrer dans un cercle vertueux, il faut regarder sa consommation plus régulièrement.
Un suivi conso associé à d'importantes économies d'énergie
Le suivi de consommation a-t-il un impact mesurable sur celle-ci ?
B.L. : Tout à fait ! Fin 2024, l'équipe Recherche & Développement d'EDF a réalisé une étude auprès de plus de 1 million de nos clients et nous avons constaté que nos clients en électricité réalisent jusqu'à 10 % d'économies d'énergie en utilisant leur application EDF&Moi de manière hebdomadaire. Concernant les biénergies, c'est-à-dire les clients qui ont du gaz et de l'électricité. Ces clients arrivent à économiser plus de 10 % de leur facture. Il faut remettre ça en perspective avec le montant d'une facture annuelle moyenne. Par exemple, quelqu'un qui a un chauffage électrique et une voiture électrique peut économiser 150€ à 250€ par an. Donc quand vous gagnez 10 % parce que vous avez réussi à bien piloter, c'est loin d'être anecdotique !
Le suivi de consommation s'est donc largement démocratisé. Qu'en est-il du pilotage ? Pouvez-vous d'abord nous préciser ce que désigne ce terme ?
B.L. : Le pilotage, c'est la capacité à programmer ou à planifier ses moments de consommation. Il n'est bien sûr pas question de tout programmer. Mais je peux programmer la recharge de mon véhicule électrique ou quand je veux chauffer certaines pièces avant de rentrer chez moi en hiver. Planifier, programmer, c'est tout simplement anticiper le moment où l’on va consommer ou non.
Quels sont les freins à lever pour généraliser les pratiques de pilotage de la consommation ?
B.L. : Le principal frein, c'est que cela peut paraître complexe. Quand il n'y a qu'un prix dans la journée, c'est très clair. Deux prix, nous y sommes habitués depuis les années 1970. Mais si on commence à essayer de mettre en place des heures super-creuses ou des différences entre l'été et l'hiver, on risque une complexité tarifaire qui entraîne pour un client plus de difficultés dans son organisation et plus de charge mentale. Un autre frein, est celui de la vétusté et de l’obsolescence de certains équipements rendant impossible leur pilotage, ou du moins de croire, à tort, que ces équipements ne sont pas pilotables. L’un des grands enjeux sur lequel nous travaillons est justement d’aider à gérer cette complexité tarifaire et d’élargir au maximum les possibilités de connecter ses équipements pour centraliser un pilotage complet de ses usages dans l’application EDF&Moi et ainsi optimiser au maximum sa consommation.
« Avec le pilotage, le consommateur reste le chef d'orchestre. »
Est-ce que vous diriez que l'avenir ressemble à un monde où le pilotage de sa consommation sera devenu un automatisme, quelque chose de presque invisible pour l'utilisateur au quotidien ?
B.L. : Le pilotage ne sera jamais complètement invisible car c'est d'abord et avant tout une réponse aux attentes du consommateur qui exprime ses souhaits : avoir telle température dans telle pièce, tel niveau de confort de chauffe ou telle heure de recharge de son véhicule électrique. Ce n'est pas le système qui va décider pour lui. Le consommateur reste le chef d'orchestre. De ce point de vue, ça ne peut pas être invisible. En revanche, ça va devenir un standard, nous en sommes convaincus. On a de plus en plus d'usages électriques. Or, plus vous avez d'usages électriques, plus vous avez de consommation électrique. Et plus vous avez de consommation électrique, plus vous pouvez gagner à l'organiser et à la planifier selon les moments où ça vous coûtera le moins cher.
L'intelligence artificielle, dont on parle beaucoup, va-t-elle être amenée à jouer un rôle dans les process de pilotage du secteur résidentiel ?
B.L. : Si un client souhaite que sa pièce soit chauffée à 21°C de 18 h à 22 h, il faut prendre en considération l'inertie du domicile – la capacité à conserver la chaleur ou pas et la capacité technique du radiateur à monter en température –. Donc forcément on va lancer le cycle de chauffe plus ou moins tôt, avec un niveau de puissance plus ou moins important. Tous ces paramètres sont moulinés par des moteurs d'IA et c'est ce qui permet d'organiser au bon moment le déclenchement des appareils. À l'avenir, l'IA pourrait jouer un rôle de coach énergétique. Il s'agira de se fixer un objectif personnel : moins de carbone, moins d'euros ou plus de confort par exemple. Une fois celui-ci défini, grâce à l'IA, nous pourrons accompagner nos clients à avoir les bons gestes et les bons paramétrages de leurs différents équipements. Chaque situation devient très individuelle et pour traiter cela, les moteurs d'IA jouent un rôle crucial.
Outre la sobriété, l'efficacité énergétique est le deuxième pilier de la stratégie française de décarbonation. En quoi le suivi et le pilotage de la consommation peuvent-ils répondre à cet enjeu ?
B.L. : Qu'est-ce qui fait qu’à un moment de la journée le prix de l’électricité est beaucoup moins cher ? C'est parce que le système électrique est détendu, c’est-à-dire qu’il n’a pas besoin de faire appel à des moyens de production carbonés pour produire de l'électricité et répondre à la demande. En consommant aux heures dites “creuses”, non seulement vous économisez de l’argent, mais vous décarbonez encore plus vos pratiques.
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