Captures TikTok de tier lists

Sur TikTok, les tier lists répondent à notre besoin obsessionnel de tout classer

Sur le réseau social, les internautes s’amusent à tout classer à l’aide de “tier lists”, une méthode qui nous vient du jeu vidéo.

« Je note les insultes de la pire à la moins pire, c’est parti. » Sur son TikTok, Bianka s’amuse à trier de un à dix les différentes joutes verbales des Français, en les théâtralisant à la perfection. Comme elle, de nombreux internautes ont pris goût au filtre « BlinkRankInsultes » créé pour faire défiler des insultes aléatoirement, permettant aux internautes de les classer à leur guise. Ce jeu populaire en ligne suit les principes des “tier lists”, un classement né à l’origine des jeux vidéo. « Dans les jeux vidéo compétitifs, mais surtout dans les jeux de combat. L'important à l’époque, c’était de savoir quel personnage était le plus intéressant à jouer ou le plus dur », résume Laura Goudet, maîtresse de conférences en linguistique anglaise à l’Université de Rouen et spécialiste des jeux vidéo.

@pearja

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Notre besoin de classement est impossible à rassasier

Si dans l’univers du gaming, le principe de la “tier list” permettait de dessiner de véritables statistiques des personnages, aidant même les éditeurs à créer des fiches sur les personnages et les adapter aux envies des joueurs, son usage a évolué. Désormais, la “tier list” répond au besoin obsessionnel de notre société de tout classer. « Nous aimons bien classifier des trucs, juste qu'on appelait pas ça une “tier list”, avant », souligne Laura Goudet. Dans ses recherches, (lire Classer c’est penser), le professeur émérite en médiations informationnelles Gérard Régimbeau s'interroge sur cette nécessité. « Pourquoi sommes-nous disposés dès nos premiers apprentissages à souscrire aux exercices de comparaison, de réunion, d’appariement, de différenciation, etc. ; pourquoi notre esprit, se construit en partie sur cette faculté ? », questionne-t-il. Pour lui, cela répond à une « forme de synthèse » et de « nécessités documentaires ». Mais le classement des meilleurs fromages ou des meilleurs endroits où avoir un rapport sexuel répond-il réellement à un besoin documentaire ?

Un bon format pour interagir

En réalité, ces classements ont plus d’utilité sur la forme que sur le fond. D’une part, car TikTok a permis de développer la création en laissant la possibilité de créer ses propres filtres et développer ici son propre patron de “tier list”. D’autre part, car les réseaux sociaux ont toujours été friands de ces classements, sans doute pour l’interaction qu’ils permettaient, ainsi que l’aspect ludique et coloré des formats. Il y a quelques années, à l’âge d’or de Twitter, la “tier list” était déjà en vogue et les internautes s’amusaient des matchs et compétitions autour de catégories aussi créatives et loufoques que celles actuellement visibles sur TikTok.

Outre la passion des réseaux sociaux pour ces classements, la “tier list” fait désormais partie de la longue liste des termes issus du jeu vidéo démocratisés par les réseaux sociaux. Parmi eux, décrire une personnage de PNJ (Personnage non-joueur) ou de newbie. « Ça marche bien parce que ça recouvre des réalités qui ne sont pas vraiment vidéoludiques à l’origine », conclut Laura Goudet.

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