Thread et Yannick Noah, Victoria Abril et Pascal Praud

Comment Threads s’est taillé une réputation de réseau social de "boomers"

« Un Instagram de l’écrit », « le Facebook des années 2000 »... Threads semble avoir du mal à fidéliser ses utilisateurs et à attirer les moins de 25 ans.

« On dirait le Facebook des boomers ». Lorsqu’il évoque le réseau social Threads, l’utilisateur Adrien Saumier n’y va pas par quatre chemins. Lui qui s’était inscrit avec enthousiasme sur cette nouvelle plateforme, présentée comme le rival de X (ex-Twitter) par le groupe Meta, est déçu de ses débuts. « Sur mon fil, je reçois constamment des carrousels de photos avec des citations, des quiz qui n’ont pas d’intérêt ou des tops déjà vus et revus ». Selon lui, la faute revient à l'algorithme de Threads développé pour imiter X. « C’est une chimère mal calibrée avec une agrégation de contenus d’Instagram et de Facebook », insiste-t-il. « On ne retrouve pas l’instantanéité de Twitter et son puissant lien avec l’actualité. »

Si en décembre, Threads a fait un démarrage en trombe en Europe avec 2,6 millions de téléchargements trois jours après son lancement, l’engouement paraît être retombé. Basés sur l’écrit, les 500 caractères accessibles aux utilisateurs de Threads leur servent, bien souvent, à faire des comparaisons avec le plus vieux réseau social du groupe Meta. « Du coup Threads, c’est devenu un repère de personnes sans ambition, qui récupèrent de vieilles trends (tendances, ndlr) Facebook pour les publier 10 ans après sur une nouvelle plateforme, c’est ça ? », écrit l’internaute Maia, visiblement excédée.

La GenZ absente de Threads

À l’origine de ces critiques, le fil « pour vous » du réseau social. Outre les publications type « Facebook des années 2000 », celui-ci suggère aux utilisateurs des messages d’autres personnes susceptibles de les intéresser, en fonction des comptes auxquels ils sont abonnés. « On se retrouve avec un fil qui propose juste des publications peu intéressantes d’inconnus », rapporte Adrien Saumier. « Pour le moment, il y a un aspect “je parle comme à la maison” : les gens écrivent leurs opinions personnelles sur leur vie de famille ou leur quotidien et ce sont les principaux messages valorisés », pointe également Emmanuelle Patry, fondatrice de Social Média Lab.

Un aspect qui n’attire pas beaucoup les moins de 25 ans, déjà accaparés par d’autres réseaux sociaux. D’après la stratégiste en communication et spécialiste des médias sociaux Carina Cheklit, la majorité des utilisateurs de Threads ont plus de 30 ans. « Lorsque j'interroge mes étudiants dans la vingtaine sur leur utilisation de la plateforme, la réponse est catégorique : la plupart n'y sont pas inscrits et lui préfèrent TikTok », témoigne-t-elle. Une donnée qui peut aussi expliquer, en partie, la réputation de réseau social « de vieux », qu’aurait déjà acquis Threads.

En faire un réseau de discussions « bonne ambiance »

Pourtant, c’est avec cette apparente neutralité dans les posts mis en avant sur le fil « pour vous », que le réseau social entend concurrencer X. « Threads veut faire la différence avec son rival en instaurant une bonne ambiance entre ses utilisateurs », rappelle Emmanuelle Patry. Initialement, la plateforme était même reliée à Instagram, dont les publications positives et les clichés de lieux paradisiaques ont fait son succès. « Le but, c’est aussi que Threads soit, comme Instagram, adapté à la monétisation. Or, qui dit annonceurs dit que tout ce qui s’apparente de près ou de loin à de la politique ne convient pas », précise la fondatrice de Social Média Lab.

Mais alors Threads peut-il finir par plaire en misant sur des sujets de discussions jugés « neutres » ? Pour fidéliser leurs utilisateurs et entraîner plus d'interactions entre eux, les équipes du réseau social continuent en tout cas d'adapter, à leur façon, d'autres fonctionnalités de X. Aux États-Unis, Threads possède désormais un onglet « trending now » (ou tendances actuelles) avec la liste des mots qui font réagir les utilisateurs à l’instant T. Autre option en test : la publication en direct des scores des matchs de basket de la NBA. Une façon, là encore, d’inciter les internautes à échanger sur les résultats de leurs équipes favorites directement sur Threads. « Meta veut faire de ce réseau social un Instagram de l’écrit », conclut Emmanuelle Patry. Reste à découvrir si les discussions autour du basket ou des activités du week-end suffiront à détourner leurs utilisateurs (déjà très critiques) des débats de X ou des vidéos attractives de TikTok.

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