
Pour le meilleur et pour le pire, le phénomène de globalisation a lié les économies, les infrastructures et les écosystèmes naturels à l’échelle mondiale. Ces enchevêtrements complexes s’accompagnent d’une nouvelle famille de risques, systémiques et imprévisibles : les risques en cascade. Décryptage.
En 2011, un tremblement de terre de magnitude 9 a lieu au large de la région de Tōhoku au Japon. Celui-ci fait immédiatement une centaine de morts, mais il entraîne surtout un tsunami qui prendra la vie à plus de 19 000 personnes. La déferlante cause également la fusion des trois réacteurs de la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi et une contamination durable de la région. À l’échelle domestique, les conséquences sur la production d’énergie, les transports et les télécommunications sont majeures. À l’échelle internationale, la catastrophe met à l'arrêt cinq usines automobiles situées en Europe, et donne naissance à un immense champ de débris au milieu du Pacifique…
Le désastre, souvent décrit comme le plus coûteux de l’histoire récente de l’humanité, est une parfaite illustration des risques en cascade qui menacent des systèmes planétaires toujours plus interconnectés. Il entre dans la catégorie prospective des « Cygnes noirs », événements imprévisibles ayant une faible probabilité de se dérouler, mais dont les conséquences indirectes peuvent être majeures. Avec le rapport Et si… nous expérimentions le futur ?, AXA met en lumière ces nouvelles dépendances de façon créative et spéculative. Une manière de révéler les expositions invisibles et les chaînes de causalité inattendues, afin de mieux s’y préparer.
Systèmes et interconnexion
En 2025, France Assureurs publiait la 8e édition de sa cartographie prospective de l’assurance. Riche en analyses, le document met notamment en avant une visualisation de l’interconnexion des 25 principaux risques. L’image est éloquente et présente un maillage complexe de flèches reliant une collection de risques « causes » et de risques « conséquences ». Ce travail s’inscrit dans un processus récent de démocratisation du sujet des risques complexes, dans le sillage d’initiatives fondatrices comme la Décennie internationale pour la prévention des catastrophes naturelles (DIPCN), proclamée en 1990 ou de rapports clés, comme le Global Assessment Report on Disaster Risk Reduction (GAR). Ces piliers s’accompagnent de toute une littérature scientifique qui nous permet de distinguer les risques systémiques, les risques en cascade et les risques composites, tout en leur prêtant des caractéristiques communes : vulnérabilités multiples, interconnexion complexe des systèmes, relations de cause à effet non linéaires et dépendance à des « points de bascule ».
Passionnantes, ces explorations théoriques restent relativement difficiles d’accès. En adoptant une approche inspirée du design fiction, AXA propose en complément des illustrations concrètes du phénomène, à la fois immersives et accessibles. En faisant des microplastiques la source de nouvelles formes de cancers “infectieux” ou en tissant un lien entre déchets spatiaux et défaillance des systèmes d’énergie solaire spatiale, le rapport Et si... nous expérimentions le futur ? , met en valeur des dépendances inattendues. En faisant la démonstration des effets en cascade sur la santé ou l’industrie d’une pollution de l’eau à Amsterdam, il met en évidence l’impréparation de systèmes plus fragiles qu’ils n’y paraissent.
Nouvelles ressources, nouveaux modèles et nouvelles gouvernances
Cet intérêt croissant pour les risques systémiques s’accompagne naturellement d’un effort de modélisation et de mitigation. Un certain nombre d’entreprises et d'institutions tentent ainsi de faire évoluer leurs cadres théoriques. À travers un programme de recherche sur les « canaux de transmission macroéconomiques des risques liés à la nature », la Banque de France s’attache par exemple à rétablir le lien entre la destruction des écosystèmes naturels et les outils d’analyse économique traditionnels. D’autres, au niveau européen, tentent d’identifier les points d’intervention critiques afin d’éviter les effets de cascade… La question de la gouvernance est également centrale alors que l’ONU invite les responsables politiques à mieux « mesurer ce que nous valorisons » au-delà des logiques financières (valeur des écosystèmes, durabilité, etc.) et à « dépasser la compartimentation des systèmes de gouvernance et financiers ».
Enfin, au-delà de l’aspect technique, la dimension culturelle est une donnée centrale de l’équation. Dans l’édition 2025 de son Interconnected Disaster Risks report, l’ONU traite par exemple la question complexe de l’évolution des systèmes de croyances et de valeurs, comme préalable à tout changement radical. À travers son approche prospective, AXA se place également du côté des représentations et des imaginaires. Une manière d’encourager le pas de côté nécessaire à tout progrès d’ampleur.




Participer à la conversation