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10 ans après, que reste-t-il de Twitch plays Pokémon ?

Un jeu qui se joue à plusieurs milliers de personnes en même temps... Cela aurait dû créer un formidable chaos. Et pourtant non.

ABBBBBBK(, aaabaaajss ou encore x(araggbaj… Pour l’immense majorité des internautes, ces suites de lettres ne signifient rien. Mais pour quelques passionnés, elles révèlent des souvenirs enfouis. Ce sont des noms de Pokémon ayant marqué l'histoire de Twitch avec l’expérience sociale : Twitch plays Pokémon.

Lancé en février 2014, l’idée est de proposer une partie du jeu vidéo Pokémon Rouge (édition américaine) en permettant aux joueurs, directement sur Twitch, de choisir ensemble quelles actions devraient effectuer le personnage principal. Vous pouviez dans le chat dire en direct si vous vouliez que le personnage aille à gauche ou à droite, se lance dans une conversation ou un combat. Il était aussi possible de renommer ses Pokémons, ce qui explique les patronymes farfelus. Les milliers, voire les dizaines de milliers de participants ayant tous leur voix, le résultat était une joyeuse anarchie et une progression erratique. Ce qui n'a pas empêché les utilisateurs de venir à bout du jeu en 16 jours.

Une communauté anarchique mais soudée

Au pic de leur popularité, les parties sur Twitch plays Pokémon attirèrent jusqu'à 36 millions de spectateurs. Le soufflé est retombé depuis, mais la chaîne est toujours active. Actuellement, les participants poursuivent leur aventure sur Pokémon Battle Revolution, jeu de 2006 paru sur la Wii, et veulent fêter les 10 ans de l'expérience.

« Ce qui est intéressant, c'est comment ce projet s'est vu investi par les fans, raconte Argyrios Emmanouloudis, chercheur à l'Université Erasme de Rotterdam qui a écrit une étude sur Twitch Plays Pokémon. Tout a commencé avec un streamer anonyme, puis c'est devenu quelque chose de collectif qui a formé une véritable communauté. »

Cette communauté s'est soudée autour des difficultés rencontrées dans le jeu. Par exemple, quelques jours après le début du premier stream, une série de commandes a conduit à relâcher une douzaine de Pokémon, définitivement perdus pour les joueurs ! Ce qui mena à l'élaboration de garde-fous pour éviter ce genre de crise connue sous le nom de "Bloody Sunday".

Twitch Plays Pokémon n'est pas mort, ça joue encore

Le jeu propose désormais de basculer du mode "anarchy" au mode "democracy" où les spectateurs peuvent voter pour une action et où la plus populaire l'emporte. Ce qui réduit parfois l'aspect aléatoire du jeu et permet de sortir de certaines impasses.

« Le rôle des fans fut crucial dans l'histoire du concept, résume Argyrios Emmanouloudis. Ils ont non seulement participé au jeu mais ont aussi servi d'archivistes pour préserver la mémoire de Twitch Plays Pokémon. » Un travail qui s'est concrétisé par des lives archivées sur YouTube, des serveurs Discord pour rassembler les fans, ainsi que des sujets toujours très actifs sur Reddit, sans oublier des fanfictions, des histoires inventées de toutes pièces autour de Twitch Plays Pokémon, des créations parfois hasardeuses, décousues, mais vigoureusement libres.

Des tentatives ratées pour recréer le phénomène

« Twitch Plays Pokémon reste une expérience non officielle à laquelle tout le monde peut participer, ajoute Argyrios Emmanouloudis. Et ce, même si on parle d'une des franchises les plus connues du jeu vidéo et d'un stream hébergé par Amazon ! » Pour l'instant, Nintendo, très protecteur sur ses créations, n'a pas tenté de porter préjudice au projet, et l'a même encouragé, y voyant une source de publicité gratuite.

Twitch Plays Pokémon a été parfois copié à partir de comme Street Fighter ou Elden Ring, mais aucun n’est devenu aussi populaire. « Il y a certainement le fait que Pokémon est plus connu, mais aussi plus divertissant, considère Argyrios Emmanouloudis. Il n'y a pas vraiment d'équivalent. » La relative facilité du jeu y est pour beaucoup, étant donné que même en faisant parfois n'importe quoi, les participants parviennent toujours à leurs fins.

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