Un vieux vinyle sur lequel est apposé le logo Spotify

Peut-on vendre de la bonne musique sans dépendre de Spotify ?

Diamond Jubilee, le dernier album de Cindy Lee est superbe et il n’est pas disponible sur les plateformes de streaming. On adore l’acheter en direct.

9,1 ! Depuis quatre ans, le magazine Pitchfork n’avait pas donné une aussi bonne note à un album. Pourtant, vous ne trouverez pas Diamond Jubilee sur Spotify ou Deezer. Il est sorti sur Geocities, un site relique du Web 1.0. L’heureuse élue s’appelle Cindy Lee. Et la drag queen version diva des 50’s – Patrick Flegel de son vrai nom – en a gros contre les géants du streaming. « Le PDG de Spotify est un voleur et un war pig. Il a volé 100 millions d’euros aux rock’n rollers et utilise l’argent pour investir dans Helsing. Helsing est un innovateur en intelligence artificielle militaire », trouve-t-on quelque part sur son site.

Pour découvrir cette œuvre rétro psyché de deux heures, à la croisée entre l'ambiance de la série Twin Peaks et le son du Velvet Underground, on se rend donc sur un blog des années 90, à partir duquel l’expérience de découverte est aussi exaltée qu’organique. 

Album Diamond Jubilee de Cindy Lee

Aventure musicale DIY

En arrivant sur le site, un GIF « OPEN 24 Hours » clignote comme le néon défaillant d’un roadhouse américain. On a l’impression d’arriver quelque part. Plus bas, on trouve un lien Mega Files pour télécharger l’album, un autre pour l’écouter sur YouTube. Une participation de 30 dollars est sollicitée, mais pas obligatoire. Plus bas, il y a des informations sur l’album, des photos, des GIF, des flyers, les dates de concerts, et des liens vers les anciens albums de Cindy Lee. Plus bas encore, un lien vers un obscur court-métrage, des paroles, puis des liens cachés renvoyant vers des mix ou un site de lingerie. On découvre l’univers musical et esthétique d’un artiste, mais aussi d’une scène musicale DIY. Lors de mes recherches, j’ai navigué d’un site à l’autre, et découvert plein de nouveaux artistes. Merci Cindy Lee.

Car Cindy Lee n’est pas la seule à en avoir ras-le-bol des plateformes de streaming. Lors des récentes brouilles de rappeurs U.S., Drake a sorti un son via un lien KrakenFiles, Pharrell Williams son nouvel album sur un site Web, sans promo, ou presque – Tyler The Creator ou Pusha T ont reposté le lien. L’avantage ? L’impression de proximité avec sa fanbase est décuplée. Mais si l’album est en accès libre sur le site de Pharrell, il est bien dispo sur toutes les plateformes de streaming, contrairement à Diamond Jubilee.

Graver son CD

De son côté, l’étonnante Cindy Lee a mystérieusement annulé sa tournée en cours, ajoutant encore au mystère qui l’entoure et fait, en partie, son succès. Loin de Spotify et consorts, l’expérience Cindy Lee nous ramène à une époque moins algorithmique. Flegel ne cherche pas à parler à la terre entière, il est même convaincu de la force d’une fanbase réellement passionnée. « La partie la plus dure, c’est que des gens en aient quelque chose à faire (de ta musique). (...) Dans mon esprit, on a juste besoin de réguliers. Des gens qui couvrent tes arrières, et qui sont dans ce que tu fais. » Une stratégie payante, si l’on en croit l’expérience de cette personne croisée sur le subreddit dédié à Cindy Lee : « J’ai gravé et imprimé ça après avoir payé mes 30 dollars. Je me suis senti comme un enfant à nouveau. » J’ai moi aussi terriblement envie de commander un graveur de CD externe pour faire comme ce monsieur… Sûrement l’effet Cindy Lee.

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